AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Le plus beau but était une passe (29)

Le paradoxe, c'est donc que cette réconciliation spectaculaire de secteurs toujours plus vaste du monde intellectuel et des nouvelles classes moyennes avec le sport le plus populaire de la planète (les États-Unis constituant, encore une fois, la seule grande exception à cet état de fait) aura donc commencé à s'opérer au moment précis où la pratique de ce sport se voyait elle-même de plus en plus dénaturée par sa soumission croissante à la logique marchande. Évolution que l'intellectuel marxiste uruguayen Eduardo Galeano résumait ainsi en 1995 : "L'histoire du football est un voyage triste, du plaisir au devoir. À mesure que le sport s'est transformé en industrie, il a banni la beauté qui naît de la joie de jouer pour jouer. En ce monde de fin de siècle, le football professionnel condamne ce qui est inutile, et est inutile ce qui n'est pas rentable."
Commenter  J’apprécie          61
C’est donc aussi un livre, on l’aura compris, écrit pour tous ceux qui ont suffisamment d’intelligence pour se laisser émouvoir par la passion des autres. (À propos de « Football, ombre et lumière »)
Commenter  J’apprécie          40
cette richesse des pauvres que l'intelligentsia sait si peu soupçonner.
Commenter  J’apprécie          41
Et nombreux sont les supporters, et les dirigeants, qui préfèrent gagner sans honneur que perdre noblement.
Pepe Saria, l'avant uruguayen, racontait : "Lancer de la terre dans les yeux du goal ? Les dirigeants trouvent ça mal, quand ça se voit."
Les supporters argentins dirent mille merveilles du but que Maradona commit de la main lors du Mondial de 1986, parce que l'arbitre ne l'avait pas vu. Pendant les éliminatoires du Mondial 90, le gardien de la sélection chiliènne, Roberto Rojas, simula une blessure en se coupant au front et il fut pris la main dans le sac. Les supporters chiliens, qui l'adoraient et l'appelaient le condor, le transformèrent illico en méchant de cinéma parce que son truc avait loupé.
Dans le football professionnel, comme dans toute chose, peu importe le délit si l'alibi est bon. Prenons le mot culture au sens propre. Que cultive en nous la culture du pouvoir? Quelles peuvent être les tristes récoltes d'un pouvoir qui accorde l'impunité aux crimes de militaires et aux pillages des politiciens, et en fait des exploits?
Albert Camus, qui avait été gardien de but en Algérie, ne faisait pas allusion au football professionnel quand il disait : "Tout ce que je sais de la morale, c'est le football qui me l'a appris."
Commenter  J’apprécie          41
En témoigne l'étrange aventure survenue naguère à Paco Espinola : " Le football n'intéressait pas l'écrivain uruguayen Paco Espinola. Mais, un après-midi de l'été 1960, cherchant ce qu'il pourrait écouter à la radio, Paco tomba par hasard sur la retransmission d'un match. C'était le derby classique. Peñarol fut écrasé 4 à 0 par le Nacional.
Le soir venu, Paco était si triste qu'il décida de dîner seul, pour ne gâcher la vie à personne. D'où venait toute cette tristesse? Paco était près de penser que c'était une tristesse sans cause, ou due à la peine d'être mortel, quand il se rendit brusquement compte qu'il était triste parce que Peñarol avait perdu. Il était supporter de Peñarol et il ne le savait pas. "
Le cas des intellectuels n'est peut-être pas aussi désespéré qu'il y paraît.
Commenter  J’apprécie          33
On sait que la mise aux normes libérales d'un espace géographique donné (autrement dit la construction des infrastructures indispensables à l'implantation d'un mode de vie capitaliste) suppose toujours la destruction préalable de l'ancien tissu urbain et rural légué par l'histoire - à l'exception, bien sûr, d'un patrimoine muséifié destiné en priorité à la consommation touristique étrangère. Dans les conditions ordinaires, un tel travail de "rénovation" (ou de "modernisation") rencontre le plus souvent une résistance obstinée (et que les médias libéraux s'empressent de dénoncer comme "conservatrice") de la part des populations locales concernées. Or, comme Naomi Klein l'a remarquablement établi, l'un des traits de génie du capitalisme contemporain est précisément d'avoir appris à utiliser - pour atteindre cet objectif - ce qu'elle appelle la "stratégie du choc". Selon ce nouveau schéma idéologique, les différentes catastrophes naturelles (par exemple l'ouragan Katrina en Louisiane) doivent désormais être comprise comme une occasion providentielle de reconstruire dans sa totalité chaque site dévasté en fonction des seules normes urbanistiques exigées par l'accumulation du capital (processus qui, en temps normal, demanderait évidement plusieurs décennies). Toutes proportions gardées, on peut donc considérer que les grandes cérémonie mondialisées - comme, par exemple, les expositions universelles, les jeux olympiques ou, bien sûr, la coupe du monde de foot-ball - jouent à présent un rôle très similaire. Elles fournissent, en effet, un prétexte idéal (au même titre, par conséquent, qu'une catastrophe naturelle ou une guerre) pour "faire du passé table rase" et installer en un temps record - dans une région donnée du monde - certaine des infrastructures (urbanisme adapté à l'automobile, complexes hôteliers géants, centres commerciaux tentaculaires, nouveaux systèmes de transport et de communication, etc.) exigées par une économie "moderne" et "compétitive", autrement dit, capitaliste.
Commenter  J’apprécie          31
Dans une société capitaliste, un train en cache souvent un autre, et ce que nous sommes ordinairement invités à célébrer comme un "progrès" comporte généralement une face d'ombre au moins tout aussi importante.
Commenter  J’apprécie          31
C'était un sport qui n'exigeait pas d'argent et qu'on pouvait pratiquer sans autre moyen que l'envie de jouer.
Commenter  J’apprécie          21
Qu'on imagine par exemple un individu, entièrement dépourvu de sens poétique : quels que soient par ailleurs son intelligence et son sens de l'observation, il est clair qu'il aura le plus grand mal à apprécier exactement la profondeur du mouvement par lequel l'économie régnante en vient, peu à peu, à imposer des manières de parler (notamment dans la jeunesse, sa cible privilégiée, à tous les sens du terme) où toutes les fonctions critiques du langage ont été neutralisées. De la même manière, celui qui ne parvient pas à ressentir avec son intelligence la voluptueuse inutilité du sport (lequel, notait encore Lasch, satisfait "l'exubérance que nous gardons de notre enfance" et entretient le plaisir d' " affronter des difficultés sans conséquences " ) ne parviendra pas non plus à saisir l'étendue réelle de sa mutilation présente, ni l'ampleur des nuisances qui menacent son avenir.
Commenter  J’apprécie          21
" L'histoire du football est un voyage triste, du plaisir au devoir. À mesure que le sport s'est transformé en industrie, il a banni la beauté qui naît de la joie de jouer pour jouer. En ce monde de fin de siècle, le football professionnel condamne ce qui est inutile, et est inutile ce qui n'est pas rentable. Il ne permet à personne cette folie qui pousse l'homme à redevenir enfant un instant, en jouant comme un enfant joue avec un ballon de baudruche et comme un chat avec une pelote de laine."
Commenter  J’apprécie          21






    Lecteurs (47) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Philo pour tous

    Jostein Gaarder fut au hit-parade des écrits philosophiques rendus accessibles au plus grand nombre avec un livre paru en 1995. Lequel?

    Les Mystères de la patience
    Le Monde de Sophie
    Maya
    Vita brevis

    10 questions
    440 lecteurs ont répondu
    Thèmes : spiritualité , philosophieCréer un quiz sur ce livre

    {* *}