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Critique de encoredunoir


On a déjà eu ici une première occasion de dire le bien que l'on pensait de Zygmunt Miloszewski lors de la parution en France de son roman, Les impliqués. En voici une deuxième avec la suite des enquêtes du procureur Teodore Szacki.
Avec Un fond de vérité, Miloszewski poursuit sa radiographie de la Pologne des années 2000 et de l'opiniâtreté avec laquelle les fantômes du passé s'accrochent à la société polonaise. Et là où, à mon sens du moins, Les impliqués souffraient quelque peu d'une mise en place un peu longue, l'auteur réussit là à plonger directement son héros et le lecteur dans le bain. Muté après son divorce dans la petite ville de Sandomierz, Szacki a quitté Varsovie et traîne sa déprime entre deux affaires de violences domestiques. Mais le procureur abonné aux affaires insolites va finalement avoir l'occasion de se plonger à nouveau dans un dossier complexe quand, devant l'ancienne synagogue de la ville, est découvert le corps, saigné à blanc selon un vieux rituel d'abattage juif, de l'épouse d'un notable de Sandomierz.
C'est avec un réel plaisir que l'on retrouve une deuxième fois Teodore Szacki, procureur mélancolique et imbu de sa personne, condescendant, vaguement misanthrope et pourtant, aussi peu sympathique soit-il, réellement attachant, ne serait-ce que parce que s'il ne se fait pas d'illusion sur les autres, il n'en a pas non plus sur lui-même. Confronté ici à ce qui ressemble étrangement – trop étrangement peut-être – à des crimes rituels juifs, Szacki voit donc une nouvelle fois ressurgir les spectres qui hantent la conscience collective polonaise.
Les impliqués parlaient des fantômes du communisme, Un fond de vérité met l'accent sur l'antisémitisme endémique de la société catholique polonaise. Toute la question pour Szacki, s'il sent bien que les crimes qui commencent à se succéder à Sandomierz relèvent de la mise en scène et visent à désigner un coupable idéal, sera de déterminer si, malgré tout, il n'y aurait pas un fond de vérité dans tout cela. D'autant plus que la combinaison de crimes menés par un ou des Juifs et de l'éventualité de l'apparition d'un tueur en série ne peut qu'exciter des médias populistes prêts à monter l'affaire en épingle :
« La plupart des présentateurs gominés donnaient l'impression de tenir sans arrêt une main dans leur froc et de se branler plus fort à chaque fois que les mots « en série » étaient prononcés. Un spectacle affligeant. Il remarqua également que les nationalistes de droite levaient le menton de plus en plus fièrement […] »
Si l'enquête en elle-même est passionnante à suivre grâce à la manière dont Zygmunt Miloszewski fait pénétrer au lecteur l'esprit acéré de Szacki, ce qui fait là encore le grand intérêt du roman est surtout la manière dont l'auteur se plaît à mettre à jour la face sombre d'une société polonaise toujours tourmentée par son passé et dans laquelle les anciens antagonismes n'arrivent jamais vraiment à s'effacer. Il y aussi, comme avec Varsovie dans Les Impliqués, la manière dont Miloszewski se fait le portraitiste de Sandomierz jusqu'à en faire un personnage à part entière. le tout formant un roman captivant de bout en bout, spirituel et brillant.
Bref, ce deuxième livre installe indubitablement Zygmunt Miloszewski parmi les auteurs de romans noirs qu'il est aujourd'hui impératif de suivre.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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