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Critique de jeandubus


Les boulevards de ceinture.

Troisième incursion dans l'oeuvre du prix Nobel..
En son temps Bernard Pivot aurait écrit dans une revue (cf. la critique de Renod pour quartier perdu) « il y a, dans l'oeuvre de Modiano, une opposition très forte entre une géographie extraordinairement précise et une temporalité beaucoup plus floue, au calendrier incertain ».

Pour la temporalité, on est d'accord (ce qui permet de lire chaque roman dans un ordre indifférent), mais pour la géographie sûrement pas, puisque de ces boulevards de ceinture, Modiano ou plutôt « le narrateur » fils de. (du baron Deyckecaire / Decker) en fait très vite le tour, effleurant la place d'Italie et le boulevard Masséna, l'air horrifié : « Soult, Masséna Davout, Kellermann, pourquoi a-t-on donné des noms de vainqueurs à ces lieux incertains ? » …. (On est loin de la géographie extraordinairement précise du « zone » de Jean Rolin* qui décortique réellement Paris au scalpel).

On retrouve le même détachement et disons la même décadence confortable de
« quartier perdu » et de "rue des boutiques obscures".
A force, comme dans les "exercices de styles" de Queneau, Modiano retranscrit sous une forme ou une autre l'aventure banale du "gommeux de la gare saint Lazare" deux fois et à dix ans d'intervalle face à son père.
La première au sortir du lycée, la seconde après enquête dans une auberge en bordure de la forêt de Fontainebleau, A Milly ou Barbizon (la géographie n'est pas extraordinairement précise...), là où les aristos ont leur « campagne » et partouzent à qui mieux mieux (cette fois c'est clairement dit).

Le baron habite au prieuré, et ses potes un peu méprisants habitent la villa « Mektoub ». Un monde « interlope » comme annoncé en introduction.
Ça se passe pendant les « évènements ». L'«occupation » précise la quatrième de couverture. Une occupation sans allemands ? Un détail… ou alors une vision qui rejoindrait une fois encore les « évènements » de Jean Rolin quarante ans après !!!
Le narrateur (né en 1945 à Boulogne Billancourt) se fait appeler Serge Alexandre et il est ….écrivain.

Dix ans plus tôt, son père a tenté de le tuer en le poussant sous le métro à la station Georges V. Une bonne blague qui se termine avec un verre à la Brasserie Lorraine :
« Vous savez, je ne vous en veux pas (…) si nous prenions un verre ? Il faut fêter ça !». Très plausible, n'est-ce pas?
Dix ans plus tard, à l'auberge du Clos Foucré son père ne le reconnait pas. Seconde blague pour cet homme louche particulièrement désopilant.

A ce prix-là, la recherche du père devient très risquée. Heureusement notre grand Patrick sérieux et pugnace continuera sa quête dans les épisodes à venir. Il a le temps.

Hier, j'étais dans la minuscule « librairie » du théâtre de l'Odéon (Ivanov/Luc Bondy) et s'étalait sur une table l'oeuvre complète de notre nobélisé découpée comme un puzzle dans la nouvelle édition Folio. Sur les quatre opus que j'ai examinés, deux parlaient de papa maman, et les deux autres restèrent plus mystérieux, avec peut être une histoire d'amour en filigrane...
Il y a sûrement quelque chose qui vaille la peine, qui émerge. C'est à n'y rien comprendre.



* Jean Rolin est né cinq ans après Patrick Modiano à …Boulogne Billancourt.


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