La dette

La detteAlbane Mondétour commence par la rencontre d'un homme et une femme dans un parc. Ça pourrait être le début d'une belle histoire tout ce qu'il y a de plus classique, et ça le serait sans doute, si nos tourtereaux n'avaient pas chacun un problème à régler.
Edouard, homme volage, est en couple avec une autre femme dont il doit se séparer.
Lucrèce est une femme fragile, sujette à des cauchemars récurrents, des rêves qui ressemblent aux souvenirs d'une autre personne, d'un autre temps, qui lui laissent un sentiment de malaise et qui vont finir par évoluer pour nous proposer un scénario déroutant.

Nous voilà donc parti pour une histoire à trois directions, une histoire d'amour qui se construit, une rupture d'où va suinter la jalousie, et la raison des cauchemars à identifier.
Ce qui va surtout nous donner deux fils, deux intrigues l'une reliée au passé, l'autre tout ce qu'il y a de plus moderne, la rupture amoureuse et ses aléas. Deux histoires s'entremêlent, l'une bien ancrée dans le réel, l'autre, issue des cauchemars de Lucrèce. Là ou l'une revêt un caractère des plus banal pour notre époque, la seconde nous emporte sur les voies du fantastique. le dosage est subtil et bien équilibré. On ne part pas bille en tête dans une aventure totalement surréaliste, mais on reste clairement dans le concret sur lequel se greffe une dose de paranormal. On y croit, on n'y croit pas, peu importe, les esprits rationnels peuvent toujours se rabattre sur un éventuel problème psy de l'héroïne en quête d'identité.
La confiance des uns et des autres va être mise à rude épreuve tout au long de l'histoire.

Ce livre nous plonge dans l'héritage. Pas celui de biens matériels, mais un héritage transgénérationnel. On reçoit tous quelque chose de nos ancêtres, qu'on en ait plus ou moins conscience. Pour Lucrèce, cet héritage se matérialise sous la forme d'une dette qui hante ses nuits. Une dette, c'est un truc qui se transmet d'une génération à l'autre jusqu'à ce qu'elle soit réglée. Chacun, condamné à reproduire le même schéma que son prédécesseur, n'entrevoit qu'une seule issue. Quelqu'un refile l'addition au suivant avec l'espoir que l'un d'entre eux finira par effacer l'ardoise. Mais comment faire là ou tant d'autres ont échouées avant ? Existe-t-il un moyen d'infléchir e destin en marche ?
La tension monte au fil des pages, comment se sortir de ce piège qui a pris source bien avant sa naissance si ce n'est en partant à la recherche de son passé pour le comprendre.

Les rencontres que l'on fait dans la vie sont elles fortuites, ou y a-t-il quelque chose qui guide nos pas ? Cette histoire interroge sur la place du hasard ou du destin. On peut toujours se servir de notre libre arbitre pour changer le cours des choses, mais sommes-nous condamnés à suivre le chemin tracé à l'avance avec quelques arrangements possibles, ou possédons-nous la maîtrise totale de notre propre destinée ? Personnellement, je n'aime pas me dire que tout pourrait être écrit à l'avance, sinon, à quoi bon ?

Tout s'accélère dans la deuxième partie du récit. La fin me paraît trop vite amenée, elle me laisse un goût d'inachevé. Tout à coup, la révélation se fait, Lucrèce comprend tout, nous avec, le soufflet retombe, on se doute de ce qui va se passer et comment ça va finir. J'y ai pensé à un moment, après tout, il y a deux parties dans cette histoire.
Et finalement, les choses se confirment. Je n'aime pas deviner la fin des thrillers. J'ai toujours l'impression que l'auteur n'a pas bien dissimulé toutes ses informations ou alors en a fourni de trop précises, pas suffisamment brouillé les cartes et me procure le sentiment d'avoir été flouée d'une partie de l'enquête. Peut-être aussi en ai-je trop lu ce qui me rend les ficelles trop apparentes.

Un thriller assez lent dans sa mise en place mais qui permet d'apprivoiser les différents personnages. Un peu de fantastique, des allers-retours dans le passé et un secret de famille font de ce roman une très bonne lecture.