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Citations sur Un homme de parole (18)

.....dans l’espoir de pouvoir lui adresser un jour la parole, elle entama secrètement la lecture de la Critique de la raison pure. Quand elle assista un matin à une scène qui la laissa pantoise. Assise à côté de Comète, une collègue lui racontait avec force détails très ennuyeux la perte d’une boucle d’oreille, situation qu’elle exposa en l’accompagnant d’une description détaillée du bijou. Elle précisa où elle l’avait perdue (chez elle) et comment elle avait demandé à son fiancé de l’aider à la chercher. Elle ne lui épargna pas le style direct souvent utilisé par les femmes pour relater les faits : « Je lui ai dit : “Pere, aide-moi à chercher ma boucle d’oreille.” Il m’a répondu : “Bien sûr. Pas de problème !”, et j’ai précisé : “D’après moi, elle est ici, à la maison.” » Elle rapporta qu’elle l’avait dépeinte au fiancé (nouvelle description de la boucle d’oreille), détailla tous les endroits où ils l’avaient cherchée et révéla comment, finalement, elle l’avait retrouvée. Après ce récit, débité d’un ton soporifique, elle ôta sa boucle d’oreille afin que Comète l’admire longuement. Lot, qui imaginait que rien n’intéressait moins Comète que des boucles d’oreille, n’en croyait pas ses yeux. Pour couronner le tout, la fille termina son récit en apothéose par une réflexion sur le hasard (elle osait lui faire part d’une réflexion sur le hasard !) d’une absolue banalité. Mais qui tombait à pic ; l’ampleur du hasard était telle qu’une semaine plus tard... elle avait perdu la deuxième boucle d’oreille.
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Comète promenait son être musical partout où il allait. Il ne faisait rien sans musique. Il écrivait en musique, il pensait en musique, il cuisinait en musique, il respirait en musique......La musique de Wagner laissait craindre le pire. Une journée périlleuse, qui présageait l’orage. Le Comète le plus enflammé pouvait alors surgir, sa voix retentissant comme un coup de tonnerre pour une fadaise, échouer à monter un ailloli aussi ferme que d’habitude par exemple. Un jour comme celui-ci, il pouvait réciter du Rubén Darío ou du Quevedo les larmes aux yeux (s’il avait définitivement raté un ailloli assez ferme) ; en revanche, s’il avait confectionné le plus parfait des aillolis, au prix de nombreux œufs, il se régalait quelques heures plus tard d’un repas copieux, et dans ce cas il changeait de musique. Schubert indiquait qu’il cuisinait un plat délicieux et inattendu en t’attendant, la tête emplie d’idées sereines. Quand Schwarzkopf chantait des lieder de Strauss, il était le plus souvent assis mélancoliquement sur le canapé, prenait des notes sur ses carnets si caractéristiques, lisait Spinoza et levait les yeux vers la fenêtre dans l’espoir d’apercevoir une brume épaisse. Quand il chantait ces mêmes lieder, c’était qu’il se rasait, content de sortir dans un but agréable, assister à une réunion entre amis, petit-déjeuner de pilchards salés, donner le cours qu’il avait envie de faire. S’il écoutait les Variations Goldberg, il était probablement plongé dans l’un de ces problèmes mathématiques qui le tourmentaient de temps à autre. Mais quand tu entendais le chanteur mexicain Jorge Negrete ou un chant révolutionnaire nicaraguayen ou mexicain, tu savais que des frijolitos et des tacos de toutes sortes t’attendaient, ainsi que de nombreux émois et une longue siesta. La musique de Schönberg ou de Cage annonçait la froideur de l’entomologiste. Et quand Charlie Parker jouait, tu n’avais simplement rien à attendre (il ne s’apercevrait même pas de ta présence).
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Comment ne pas regretter cet univers où l'alcool , les idées, les femmes, les rêves coulaient à flots, où l'on jouissait de la vie et où l'imprévu surgissait à chaque rencontre ? Comète (né au pied d'une vigne, à la Brassens) vénérait l'alcool. Il en avait côtoyé les risques en certaines occasions, et il avait eu la chance de savoir en tirer le meilleur et de se libérer du pire. Sans jamais renier son attirance. Il ne joua jamais non plus à l'enfant terrible qui se fait passer pour plus canaille qu'il n'est : il avait passé les bornes alors qu'il aspirait au calme et à la prudence, qu'il transmettait. Quand un ami lui racontait que le médecin lui avait interdit de boire, il le rassurait : "On se soûlera de paroles, va, on regardera la lune jusqu'à l'ivresse".

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Comète mettait ici en évidence l’ambiguïté de la relation entre charisme et pouvoir. En effet, pour réussir à commander, il faut désirer le faire. Et pour savoir commander, souvent, il faut ne pas le vouloir. D’où le paradoxe insoluble qui expliquerait une grande partie de la vie politique et sociale, sinon la totalité.
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Manger peu ne suffit pas ; au contraire, rien n’est meilleur pour la santé que de ne pas manger, dans une époque où toutes les denrées comestibles nous intoxiquent peu ou prou.
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Il me faudra donc mettre de l’ordre dans ce réseau routier de mots, ne pas trop dévier, car autrement qui sait ? Un ordre simple, par exemple. Chapitres A, chapitres B. Dans les chapitres A, je parlerai de la façon dont nous nous sommes connus, de nous, de la vie avec lui. Dans les chapitres B, j’évoquerai la façon dont je l’ai perdu, la vie sans lui. Cela me servira aussi à moi comme règle simple, mnémotechnique (car je suis légèrement dans la confusion dernièrement) : A d’attachement, d’amour, A d’allégresse, A d’abri, pelotonnée tout contre lui. B de barbare, B de brutal, B de blanc, vide désertique, B de bourgeonner à nouveau. Facile à se rappeler.
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Lot n’eut plus d’autre solution que de lire en lui, car en romancière qu’elle était, elle lisait dans les pensées. C’est l’une des particularités communes aux romanciers et aux paranoïaques. Mais tandis que les paranoïaques sont convaincus de lire exactement les pensées, les romanciers savent qu’ils peuvent se tromper, simplement ils tentent leur chance. Lot essaya de lire en lui, ce qui n’était pas facile, et encore moins de profil.
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L'écriture nous permet de mettre une distance qui me plait, entre nous et les tragédies et malheurs de nos vies. Il est important de trouver un équilibre entre la mémoire et l'oubli, et c'est ce que j'ai cherché à trouver en écrivant cette histoire. 
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Moi j’aspirais à vivre l’Amour Absolu, un amour qui se suffirait à lui-même, difficile, riche et complexe, au-delà duquel je n’aurais besoin de rien. Car il contiendrait tout. Dans le même panier, la physique et la chimie, la musique et la logique, la descendance et la transcendance. Pas question de répartir astucieusement mon capital d’amour : il fallait que je trouve la satisfaction de tous mes appétits, nombreux et exigeants, dans la même personne, et tout serait désormais pour elle. Je voulais tout dans un être unique, tout dans un même refuge, tout à l’abri, ce devait être ainsi ou ne pas être dans l’absolu.
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Ne plus réussir à aimer quand on s’obstine à continuer de le faire est une chose horrible, l’une des plus tristes qui puissent arriver. Infiniment plus triste que d’être quitté.
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