Adeptes de westerns comico-tragiques à la sauce épicée béninoise retravaillée, les portes du phar'west vous ouvrent ici tout grand leurs battants chevillés de rouille dans un crissement long, sonore et lugubre annonciateur d'une haute destinée transcendante qui lie leurs protagonistes à la vie à la mort à jamais.
Il fut un temps, Johnwaynien, où les bons écrasaient toujours les vils méchants et sauver la morale d'une balle sifflante logée en plein front, et finissaient sans doute, tout péteux, dans leurs champs à cultiver gaiement leur honnêteté, trouée quand même de quelques manquements aux règles dures et inflexibles du vieil ouest américain.
Puis il y eut le temps du cow-boy italien, Terencehillien, égaré, tout poussiéreux, sur sa fière monture qui cultivait - lui aussi - sa flemme congénitale à coups cinglants de revolver, plus rapides que l'éclair, pour rester peinard à l'ombre de son parasol improvisé planté dans la selle de son cheval et continuer, vaille que vaille, à rester libre comme l'air et puant comme un putois. Lui ne tuait pas. Il impressionnait. Il épatait la galerie de tronches creusées de rats infectés par la haine et la jalousie. Ils bouillonnaient de colère, tandis que le héros au coeur généreux de grosses baffes bien piquantes s'en allait partout et nulle part, le long des chemins caillouteux, aussi insouciant qu'un nouveau né qui gazouille sous les petits oiseaux de papier suspendus à son berceau. Il récitait parfois cette morale paradoxale, aussi surprenante que la trace de pneu que vous avez laissée au fond de votre ben au petit matin un jour de cacalamité : "ceux qui vous retirent de la merde ne le font pas toujours pour votre bonheur. Et ceux qui vous mettent dans la merde ne le font pas toujours pour votre malheur."
Puis il y eut un autre temps, orageux, imprévisible comme la claque d'une femme qui s'incruste sur votre joue, un temps Clinteastwoodien où le bon reconverti en paysan douteux, gauche avec les cochons, était un ancien vraiment gros méchant, un putain de fils de pute qui butait sans distinction aucune tout ce qui se mettait en travers de sa route, pourvu que ce tout soit quand même agité de quelques soubresauts de vie : poules, vaches, enfants, femmes, hommes, limaces, coléoptères, insectes, amibes etc. Liste non exhaustive la demander à Dieu le père. Lui, ' valait ne jamais l'avoir connu, et même n'avoir jamais osé naître, surtout si ses yeux imbibés de haine noyée dans l'alcool dardaient sur vous des prunelles en feu...
Enfin ! Il est un temps nouveau, un temps qui ouvre les portes d'un nouveau mysticisme éclairé, où le cow-boy, créature mythique qui chevauchait nos rêves d'enfant, nous hante sans suffisance, suffisamment depuis longtemps, depuis la nuit des temps pour qu'on en érige enfin une religion ! Notre auteur ici
Alphonse Montcho , sympatoche à bien des égards, dont le nom vole par delà la barrière de l'enclos comme un joyeux sombrero, a compris qu'on ne peut tuer le cow-boy qui sifflote en nous depuis toujours sans en faire revivre, pour le grand malheur de certains et le bonheur de tous, son mort-vivant...
Les croyances béninoises s'invitent ici, on l' "aura" compris, dans "
L'ombre du zombie" pour danser avec le mal au bal du démon, sous une pluie de balles. Mais n'est pas démon qui veut, et le démon n'est pas toujours celui qui nous fait redresser le poil...
Il semblerait, à la lecture du roman de ce jeune auteur, qu' un certain déterminisme de la rencontre, inscrit par avance dans le sang et la chair, fait s'agglomérer des esprits en forte sympathie, en connexion neuronale intime, comme il lie les méchants et les bons dans un lien insécable, que la mort ne peut elle-même trancher, et que le mauvais qui est en nous ne sera jamais que le spectre du bon qui navigue en un autre, et vice-versa.
Alphonse à l'art et la manière de revisiter la langue française afin qu'elle claque et fuse à nos oreilles en images bruyantes, sonnantes et trébuchantes de feu et de fer. L'espace verbale qu'il nous fait occuper vaut à lui seul son pesant d'or.
L'ombre du zombie plane désormais sur nous, ses griffes acérées perdues au bout de leurs doigts osseux voudraient nous arracher à la lumière, mais la vie se débattra toujours, encore et encore en dépit de ces têtes de mort qui se penchent,menaçantes, sur nos beaux berceaux blancs et qui phagocytent nos rêves charmants...