Incapable de résister à l'appel, Babouchka s'y précipite, s'y enlace, y enroule et déroule ses arabesques et s'y fond avec délices. Attentive, elle cherche les modulations. Elle vocalise et oublie le reste. Elle envahit la nuit d'un côté de la Terre à l'autre.
Elle repousse l'évocation du temps cruel qui passe trop vite et abîme les plus jolis rêves sur son chemin.
l règne alors une grande effervescence dans la plaine. Tous les éleveurs rejoignent en famille les troupeaux. Chaque animal doit être soigneusement peigné afin de récolter cette fibre tellement convoitée qui se cache sous les grands poils et à partir de laquelle on produira le cachemire.
- Le chemin le plus long est celui où on marche seul.
(P. 64)
Batbayr, l'amertume au coeur, a dû se résoudre à céder son troupeau décimé au plus offrant. A son grand regret, la mise a été remportée par un propriétaire chinois qui guettait comme un prédateur. Il n'a pas eu le choix. Comment lutter contre l'argent des riches éleveurs industriels qui font la loi jusque dans ses montagnes et ses steppes.
Le cachemire est devenu une manne pour la Chine, premier producteur mondial. Des ateliers de la "fibre de diamant" poussent comme des champignons un peu partout. (p; 33)
Qui veut gravir une montagne commence par le bas.
A force d'être traitées comme du bétail, nous nous sommes conduites comme des animaux. (p. 150)
Ses frères racontaient avec une voix pleine de mépris que les pays occidentaux adorent la guerre à condition qu'elle se déroule loin de chez eux. Ils la font par ennui ou pour l'argent et sont pleins de contradictions. Ils sont capables de tout mettre en œuvre pour sauver l'un des leurs en danger, capables de chercher avec acharnement des remèdes à leurs maladies durant des décennies, mais, dans le même temps, ils tuent sans scrupules en parlant des droits de l'homme. Ils ont la doctrine dans la bouche, mais non dans le cœur.
Elle n'appartient plus à aucune patrie; ni celle qu'elle fuit, ni celle qu'elle espère, ni celles qu'elle va sillonner. Elle n'est plus qu'une migrante clandestine, un parasite. Son prénom, qui évoque les eaux cristallines du torrent qui dévale les montagnes, qui riait telle une promesse dans le ciel indigo de la steppe, n'aura plus aucun sens pour des oreilles étrangères.(p. 107)
Si on ne peut empêcher les oiseaux du malheur de voler au-dessus de nos têtes, on peut les empêcher de faire leurs nids dans nos cheveux.