L'homme moderne n'est plus qu'un cimetière à gènes corrompus. Adam et Eve souffrent d'Alzheimer et Dieu s'amuse aux dés dans un trou noir nommé abîme.
Mais sentir les choses ne suffisait pas toujours.
L'adrénaline lui procurait chaque fois le sentiment de vivre à fond. Bien meilleur qu'un rail de coke...
Mary avait encore du mal à accepter la métamorphose de son père. Comme Lauryn, la douleur du traumatisme l’empêchait de voir ce qui subsistait chez les régressés. Leur part irréductible d’humanité.
Malgré leur mémoire défaillante, un lien demeurait, aussi léger que l’air, aussi doux que la tendresse ; Kyle n’aurait su l’expliquer avec des mots. Il savait simplement que ça existait.
L’humanité est parvenue à une impasse évolutive. En fait, stricto sensu, il n’y a plus d’évolution humaine, parce que la médecine pallie tous les défauts du corps, les répare tous. Myopes, aveugles, handicapés, malades de pathologies génétiques, les hommes survivent et transmettent leurs gènes délétères à leur descendance, alors qu’il y a seulement quelques siècles, l’évolution les aurait éliminés.
Selon lui, l’être humain n’était qu’une décharge génétique où s’accumulaient des erreurs dans l’ADN. Les erectus, en revanche, incarnaient une forme de perfection.
Nous avons mis à profit l’intelligence incomparable dont la sélection naturelle nous a dotés. Mais nous avons aussi réduit des peuples en esclavage, minéralisé les sols, dévasté les forêts, saccagé l’environnement. Nous avons persisté à croire que nous avions tous les droits parce que nous possédions les clés de cette merveille qu’est la Terre. Deux mots définissent notre espèce aujourd’hui : arrogance et aveuglement.
Par notre aveuglement, nous avons dévasté la Terre. Aujourd'hui se pose une question très simple pour l'Humanité : vivre ou mourir par avidité.
Le problème, c'est que nos cerveaux sont formatés pour ne jamais répondre à ce dilemme. Vous avez entendu parler du striatum ? C'est une structure nerveuse logée sous le cortex, qui libère la dopamine quand nous satisfaisons nos besoins fondamentaux. Or, le striatum, forgé à la préhistoire, est devenu mortifère à l'ère industrielle. Le besoin d'assouvissement est sans fin, la machine s'emballe, on veut toujours plus et on finit par nier la menace du changement climatique en dépit de la raison, parce que rien n'est pire que l'incertitude.
Les hommes ne pouvaient décidément pas se passer d'idoles.
Le XXe siècle et le début du XXIe siècle avaient été jalonnés de crises sanitaires majeures, jusqu'aux vagues récentes de coronavirus. Pandémie Kruger exceptée, l'ensemble des épidémies avait totalisé des millions et des millions de victimes. A elle seule, la grippe espagnole, en avait décimé jusqu'à 50 millions entre 1918 et 1919. En percutant la Terre il y a soixante-six millions d'années, un astéroïde géant avait été le fossoyeur des derniers grands dinosaures. Quel agent pathogène serait "l'astéroïde" de l'espèce humaine ? Virulence, extrême contagiosité, absence de réponse aux antiviraux...