Citations sur Nujeen, l'incroyable périple (67)
Je savais qu’on ne retournerait pas à Alep. Au bout de six mois à Manbij, mes parents sont allés chercher nos affaires. Yaba ne voulait pas, mais les femmes kurdes sont très impressionnantes et Mustafa plaisantait sur le fait que mon père avait lus peur de ma mère que de la guerre.
On pourrait penser qu’un pays comme la Hongrie, qui a été coupé de l’Europe occidentale derrière le rideau de fer jusqu’à il y a vingt-cinq ans, serait le dernier à construire une clôture. Mais contrairement à l’accueil chaleureux que nous avions reçu en Serbie, le Premier ministre hongrois du parti de droite Viktor Orbán semblait véritablement détester les migrants. […]
On se serait crues dans un jeu vidéo où les routes sont sans cesse bloquées, vous contraignant à trouver un autre itinéraire.
Je n'aime pas juger, mais quelle sorte d'homme envoie son prochain à une mort certaine en se faisant de l'argent sur son dos?
Quand j'ai entendu parler des attentats de Paris, j'ai été soulagée que nous n'ayons pas de télé. Il se passe à travers le monde tout un tas de choses terribles que je ne tiens pas à regarder. C'est un autre des "principes de Nujeen" : si vous voulez rester heureux et en bonne santé, évitez de regarder les informations.
- Tu sais quoi, Nasrine ? Je veux faire le trajet comme tous les autres. Tu comprends ce que ça veut dire ?
« Nous sommes entrés en Allemagne le jour du vingt-sixième anniversaire de Nasrine. Le voyage depuis Gaziantep avait duré exactement un mois, et le dessous de mes bras était couvert de bleus à force de taper contre le fauteuil roulant. Mais nous avions réussi. Depuis notre départ d’Alep, nous avions parcouru plus de 5500kilomètres à travers neuf pays, de la guerre à la paix, un périple vers une nouvelle vie, comme mon prénom. Soudain, tout devenait quand, et non plus si. Je regardais les Allemands en me disant qu’un jour je parlerais comme eux, je vivrais comme eux, j’aimerais comme eux. »
Nous sommes simplement des gens qui qui mourrons chaque jour dans l'espoir de nous brosser les dents le matin et d'aller à l'école
Voici un autre fait sur les Kurdes. Nous avons notre propre alphabet, que la Turquie ne reconnait pas et, jusqu'à très récemment, l'utilisation des lettres Q, W et X, qui n'existent pas dans la langue turque, était passible d'arrestation. Imaginez un peu aller en prison pour une consonne !
Staline a tué 6 millions de personnes dans ses goulags et pendant les Grandes Purges. Le régime d'Hitler a été encore plus meurtrier : 11 millions de morts et 17 millions de réfugiés. Je peux vous parler de Staline et d'Hitler, mais d'aucune de leurs victimes. Est-ce que ce sera la même chose avec Assad dans cinquante ans ? Sans doute. Les gens sauront tout de lui mais rien des bonnes gens de la Syrie. Nous ne serons que des nombres, Nasrine, Bland, moi et tous les autres, tandis que le tyran entrera dans l'Histoire. Cette pensée est effrayante.
Assad, qui ne pouvait pas se permettre de perdre Alep, avait eu recours au déploiement d'hélicoptère et d'avion de combat, que nous entendions passer au-dessus de nos têtes, comme des abeilles en colère, pour larguer leurs cargaisons mortelles. Comme pour Homs, son principe était d'anéantir un quartier rebelle par des tirs d'artillerie ou des bombes, de boucler les ruines et de forcer les rebelles à se rendre.