Citations sur Grâce leur soit rendue (13)
Que puis-je raconter de Unica ? Avons-nous jamais connaissance des êtres auprès desquels nous vivons ? (p. 18)
Quelle est cette ombre qui est entrain de l'avaler, Roberto ? On pourrait croire que c'est son goût pour le pouvoir, l'argent, mais non, ce n'est pas cela. C'est à cause de sa mère, peut-être, qui ne savait pas l'aimer parce qu'elle ne savait pas la voir. (...)
c'est horrible parce que ce n'est la faute de personne. et ce manque à être vu précipite des générations entières dans le désir épouvantable et mauvais d'être reconnu à n'importe quel prix. Quelques uns luttent, certains s'en sortent, mais la plupart sombrent sans avoir trouvé ce regard qui les fonde. (p.26)
--- Que pensez-vous du qualificatif de "mystique" que l'on vous attribue parfois ?
--- Si l'on prend la plus simple définition du mot : "qui a un sens caché", je me reconnais entièrement dans cette appellation. Le langage porte sa part de mystère que nous avons le devoir de dévoiler. Notre vie est un texte qu'il nous revient d'interpréter. C'est le devoir magnifique de chaque homme. Nous sommes les rabbins de notre propre Torah. En ce sens, je suis mystique et c'est là, me semble-t-il l'état naturel de l'homme. p 93
Il n'y a rien de plus extraordinaire pour un auteur que la sensation d'avoir été lu à la mesure de ce qu'il a été tenté d'écrire. Y compris dans ses maladresses. C'est un événement compliqué, rare et précieux. De l'ordre de la communion.
(...)
Le verbe se paie comptant, et c'est sa propre vie qu'il convient de mettre sur la table, la seule monnaie d'échange qui vaille en ce type de contrat. Ce n'est pas propre d'écrire, ni doux, parce que la liberté n'est jamais douce. C'est une sale besogne, difficile, nécessaire et parfois sublime. p 94-95
Unica était née pour la lumière, mais elle en a été exilée. Unica était née pour l'absolu, mais est-ce que l'absolu est une part de ce monde ? Avec elle j'ai cru en l'espérance, avec elle j'ai cru en l'infini. Et j'ai appris qu'il faut peut-être plus de courage pour vivre que pour mourir. "J'appelle Christ, me disait-elle, j'appelle Christ, cette puissance de chaque individu à être un homme aussi bien qu'un dieu." p 19
Incipit
--- Il faut bien que certains prennent en charge l'ombre du monde, sans quoi le monde deviendrait encore plus fou et plus malade qu'il ne l'est...
- quel est ton rêve , Unica ? interroge Roberto
- Faire un enfant avec un homme et rester avec lui. Ecrire. Ne pas choisir entre les deux. Embrasser la totalité de la vie avant de mourir. Embrasser la vieillesse aussi. Savoir mourir debout. L'Absolu. L'humanité. Rien de moins. (p. 27)
Unica n'est pas morte de la publication de ses livres, elle est morte écrasée par l'ombre du monde, par l'héritage de ses pères. (p. 18)
Mais qu'est-ce que c'est Kola, une sacrée vie, sinon toutes ces douleurs sourdes et fières que même le silence ne peut dire, que l'on finit peut-être par appeler l'expérience, et qui n'est rien d'autre qu'une accumulation extravagante de pertes et de chagrins... p 434
une fois que tu as traversé toutes les questions, que tu as renoncé à comprendre, et accepté de n’être qu’un pauvre et minuscule fragment d’un mystère qui t’échappe, une fois qu’après t’être pris pour Dieu tu retombes d’un seul coup sur ton cul, alors la vie peut être ce qu’elle est : simplement la vie. Et avec elle c’est la cinquième saison qui commence.