pourquoi ne pas ficeler
l'horizon au piquet
de notre appétit que l'on sache
où poser bagages
où semer la plante
de nos pieds
(p. 33)
pourquoi les hommes sont-ils
hommes
naissent-ils d'une terre
autant que d'une mère et
d'un père
les cailloux semés remontent-ils
à la source
les enfants nés reconnaissent-ils
la couleur de leur sang à la fraîcheur
des rivières
sans ponctuation ni majuscule
bien évidemment
puisque nous n’y sommes pas
n’y vivons pas
encore
puisque de la grammaire
nous avons largué
les amarres
puisque cela parle du temps
I.
reste
il y a le brouillard tous ces nuages
reste te dis-je même si le ciel était d'azur
les feuilles mortes pourrissent sous la neige
je n'ai plus de fleurs à t'offrir
où pourrais-tu
aller
il n'y a que la terre entière
autour de nous
déjà il y a le grand fleuve à traverser
aujourd'hui il doit être gelé
et praticable à pieds
le grand fleuve de la vie
mais demain
comment feras-tu chemin inverse
sans boussole
les bras nus
il te faut chaudement te vêtir
enfile cette écharpe
de mille regrets
de millepertuis
quand me reviendras-tu
la porte une fois franchie
n'as-tu pas peur de te perdre
les chemins ne mènent pas tous à rome
demain qui passera devant ma fenêtre
qui viendra puiser dans ma huche
qui vais-je siffler dans la rue
quel cortège quelle jeune fille
[...]
verdoyer
n'est-ce pas ce qui nous attend tous
nous sommes des arbres mal plantés
qui folâtrent la nuit
[...]
enfermés dans nos boudoirs
il reste ça à vivre
quand viendra la paix
(pp. 23-24)
nous sommes plusieurs
je suis plusieurs
mais le silence nous entoure
(p69)
que l'on close les portes de la ville
que l'on étête les lilas
qui parle d'encore me dépouiller
je n'ai même plus un kopek
pour m'offrir un doigt
de porto ni
une main courante aux objets perdus
(p14)
mais qu’ai-je à faire
de l’histoire
et des frontières
de là haut
nous sommes une même
humanité
(p46)
lune pleine de février
postillons d'étoiles que chasse
le vent dans sa chevauchée
les couples s'endorment
le feu dans la cheminée
saisons qui êtes au balcon
rien ne presse rien n'arrive
pour rien
(p18)
les maisons deviennent
vraiment miennes
quand je les abandonne
(p57)