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Critique de colimasson


Et si la faim régissait nos vies à notre escient ? Amélie Nothomb exploite cette idée dans Biographie de la faim où, une fois n'est pas coutume, elle reviendra sur les années de son enfance et de son adolescence, ajoutant du mythique à une légende déjà façonnée suite aux Stupeur et tremblements et Métaphysique des tubes.


Cette fois encore, Amélie Nothomb se définit comme personnage central de son roman et se dote de cette caractéristique qu'elle juge rare : la faim. Elle examine le mot et joue avec sa polysémie, abordant non seulement la faim comme manifestation biologique et appétence pour le sucré, mais aussi la faim comme curiosité intellectuelle, comme besoin d'amour, comme appétit de vivre et comme souffrance sublimée jusqu'à l'extase. La faim : la notion est tellement évidente qu'on se demande ce qu'il est possible d'en dire. Et pourtant, la faim serait une des sensations les moins éprouvées de la société occidentale, repue et gonflée jusqu'à l'explosion. Amélie Nothomb glorifie cette faim qu'elle a su reconnaître et cherche à la conserver toujours aussi virulente dans sa manière d'appréhender le monde. Cette sensation compose les différentes étapes de sa vie comme autant de mets aux saveurs nuancées.


La faim est à l'origine de chaque acte. Au Japon, la recherche frénétique du sucré est prétexte à la mise au point de ruses habiles et d'alchimies fantastiques. A New-York, l'ivresse des alcools se mêle aux ambiances excessives et musicales des soirées mondaines. A Pékin, la désertion du corps par l'anorexie ouvre les portes d'un horizon calme et désert consacré aux lectures effrénées et à la traduction de l'Iliade et de l'Odyssée. Amélie Nothomb ne délaisse jamais une faim pour une autre et se montre aussi inspirée lorsqu'il s'agit d'évoquer le plaisir de la manducation et du jeûne, l'extase des nourritures intellectuelles, ou le bonheur éclatant qui naît de l'absorption de l'amour de l'autre.


« de longues recherches m'ont menée à ce constat : l'aliment théologal, c'est le chocolat.
Je pourrais multiplier les preuves scientifiques, à commencer par la théobromine qu'il est seul à contenir et dont l'étymologie est criante. Mais j'aurais un peu l'impression d'insulter le chocolat. Sa divinité me semble précéder les apologétiques. »


On peut croire ou non à la véracité autobiographique du roman d'Amélie Nothomb, mais limiter l'intérêt de sa Biographie de la faim à cette seule question serait aussi décevant que déjeuner dans un restaurant gastronomique alors qu'on souffre de sinusite. Tout ce qu'Amélie Nothomb écrit n'est peut-être –et certainement- pas aussi exact qu'elle le prétend, mais démêler le vrai du faux ou –mieux encore- accepter chaque étape rocambolesque de sa biographie comme on tolère les ruses des contes de fées, permet de jouir pleinement de l'originalité du regard qu'elle porte sur la vie, considérée comme un miracle ou, en tout cas, comme une aventure exaltante, aussi riche et variée qu'il existe de manières différentes de la déguster.
Lien : http://colimasson.over-blog...
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