Les étoiles rêvent aussi

S'ensuit une conversation surréaliste où j'apprends que l'on peut «acheter » des followers pour monter artificiellement le nombre de vues d'un post - parce qu'à moins de 500 k abonnés on n'existe pas - afin de recevoir de vraies vues en retour, et de vrais followers, que les filtres c'est has been, et tout un tas d'autres conseils dont je serai bien infichue de me souvenir demain.

Vous avez eu raison de suivre votre rêve et votre passion. Et que les grincheux aillent se faire voir. Vous valez mieux qu'eux.

Les navettes, en Provence, c'est une vraie religion. Tu as ceux qui les adorent et ne jurent que par la vraie recette, soi-disant, peuchère, à la fleur d'oranger et rien d'autre. Pff, moi je dis on y met ce qu'on veut. Et pis, t'as ceux qui détestent. Trop dur, trop sec, des gâteaux à la poussière, juste bons pour faire les dents des bébés et les gencives des vieux... Je t'en passe des vertes et des pas mûres! Tu devrais les mettre sur ton site, ça changerait, un peu de soleil.

- On va marcher un peu, tu ne peux pas être venue jusqu'ici sans visiter la ville médiévale. Tu vas voir, là-haut, la vue est magique.
Quand il dit là-haut, il veut vraiment dire «là-haut» ? Genre, monter l'escalier à mille marches qui part de la place? En même temps, c'est lui qui porte.
Au bout de trois minutes de step forcé, j'ai le coœur qui demande l'asile politique aux Pays-Bas.
- Allez!C'est moins dur après, m'encourage Matias déjà arrivé en haut des marches.
Je m'abstiens de répondre. C'est soit parler, soit agoniser.

- La légende raconte que ces biscuits symbolisent la barque dans laquelle la Vierge Marie serait arrivée en Provence, d'où le nom de «navettes ». Mais en vrai, ça n'a rien à voir avec les bateaux, rigole ma cheffe du jour.
- Ah, non? je fais, curieuse.
- Non, ça c'est pour les touristes et les culs bénis. En vrai, cette forme, tu vois, c'est le symbole de la fécondité féminine.

Oh, je viens de comprendre.

Tout en faisant la queue pour entrer dans le saint lieu, je reconnais deux ou trois blogueuses que je suis sur Instagram.
Le monde du livre a aussi ses influenceurs, plus discrets que ceux de la mode ou de la food, mais tout aussi efficaces et organisés. C'est drôle comme les codes se ressemblent, en fait. Les plus célèbres sont traités comme s'ils étaient eux-mêmes des créateurs, ou des écrivains en l'occurrence. Pour un peu, on leur déroulerait le tapis rouge avec entrée VIP et têtes qui se dévissent sur leur passage. S'ensuit une masse de tâcherons plus ou moins habiles, plus ou moins passionnés, qui essaient de se démarquer. Puis viennent les amateurs complets, qui partent en impro totale sur tout et ne résistent pas longtemps dans la blogosphère hyper hiérarchisée et pas si cool que ça.

Il me tourne autour comme un cobra, certainement à la recherche du point faible où il pourra planter ses crocs. Et d'un coup, ça arrive.
Soudain, je le vois tel qu'il est. Un prédateur craignant les plus féroces que lui, dans un monde qui crache à jet continu son lot de loups en rut.