Être éditeur, ce n'est pas seulement posséder un savoir-faire et le souvenir de certains enseignements. C'est d'abord manifester un vouloir-faire allié à un vouloir-rêver. C'est aussi parfois un savoir-survivre.
Je n'imagine pas que l'on puisse se dire éditeur si l'on n'a pas été contaminé par le trouble désir de l'écriture.
L'écriture procède de l'alchimie : transmuer le plomb en or, l'affect en mots.
Le lecteur, c'est en cela toute personne qui cherche dans les livres, confusément ou avec détermination, des réponses aux questions qu'elle se pose et à celles qu'elle ne se pose pas, des échos aux attentes qui la hantent.
[..] Une manière de s'encorder au monde.
Ainsi donc, au moment où, enfin, j’étais devenu éditeur, j’étais entré sans le savoir dans le processus de cette crise. Maintenant je sais , et je dis à ceux qui veulent se lancer dans l’aventure et que jamais je ne décourage : entrer dans l’édition c’est entrer dans la crise. Et c’est fort bien ainsi. La crise attise la détermination.
Il serait sans doute risqué de tirer de trop hatives conclusions, mais les jeunes loups de l' édition littéraire feraient bien de n 'être pas indifférents à ces fluctuations dans le champ matrimonial de la lecture où surgissent de multiples et surprenantes liaisons entre auteurs et lecteurs. Car à ce prix est peut-être leur futur succès de passeurs.