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Critique de FlowerPanda


Je continue mon immersion dans la littérature japonaise avec la découverte cette fois d'une nouvelle de Yoko Ogawa. J'avais déjà pu apprécier précédemment la plume de cette auteur avec Une parfaite chambre de malade et c'est donc avec plaisir que je me suis lancée dans La Petite Pièce Hexagonale. Bien m'en a pris car je l'ai beaucoup plus apprécié que ma lecture précédente.

Une fois de plus, nous avons là un récit qui se caractérise par sa quasi- absence de repères spatio-temporels, axé sur un personnage, une femme à l'âge indéterminé, elle-même à la recherche de repères dans sa vie. Ayant rompu récemment avec son compagnon, nous la suivons dans un quotidien plutôt flou. A la piscine, elle fait la rencontre d'une dame qui, sans pouvoir se l'expliquer, attire irrémédiablement son attention. Pourquoi ? Elle-même n'en sait rien et ne cherche pas une explication particulière. Puis vient un jour où elle décide de la suivre. Se perdant dans les méandres de bâtiments désaffectés, elle finit par tomber sur un drôle de couple. Ces deux personnages, plein d'affabilité, lui décrivent alors leur activité : allant de ville en ville avec leur petite pièce hexagonale, ils y restent autant de temps nécessaire. Une fois leur mission accomplie, les gens n'ayant plus besoin de leurs services, ils s'en vont de nouveau. Mais qu'est-ce que cette petite pièce hexagonale ? Qu'a-t-elle de si particulier ? A notre héroïne de le découvrir. Heureusement, Yuzuru sera là pour l'accompagner. Petite pièce à raconter, chacun y rentre, seul, autant de temps qu'il le souhaite, et raconte. Les souvenirs du passé, le présent, les projets à venir, des pensées sans queue ni tête, tout ce qu'il souhaite confier à la petite pièce. Ou bien la personne peut se contenter d'écouter le silence, son silence, ce qui en fait alors un personnage à part entière du roman. le silence n'est pas forcément négatif. Il faut apprendre à écouter et savoir quand il faut parler. Être confronté à soi n'est pas toujours évident et c'est là un apprentissage que notre héroïne devra faire. En entrant dans la petite pièce hexagonale, c'est à son moi profond qu'elle devra faire face, la poussant à s'interroger réellement sur sa vie, sur ses actes, sur ses pensées et surtout, à y répondre en toute sincérité. Nul besoin de mentir quand il n'y a personne pour nous entendre. Il n'y a rien à cacher.

« Plus on est à l'étroit, plus on entend nettement sa propre voix, et l'on doit certainement avoir l'impression de se révéler dans la vérité de son coeur. C'est ce qu'il y a d'agréable dans le monologue. »

Mais en même temps, la petite pièce fournit un auditoire, une oreille attentive, qui ne juge pas, qui laisse l'individu tout en l'accompagnant.

« - Cette colonne hexagonale est la petite pièce à raconter, n'est-ce pas ? Alors, qu'est-ce qu'on y fait dedans ? - On y raconte, bien sûr, répondit-il tout net, sans rien ajouter. - Ce que l'on aime, ce qu'on déteste, ce que l'on cache au fond de son coeur ou ce que l'on n'arrive pas à cacher, ce qui nous embarrasse, nous réjouit, des histoires du passé ou de l'avenir, la vérité ou n'importe quoi, tout est possible. On dit ce qu'on a envie de dire à ce moment-là. »

L'individu n'est pas délaissé mais est remis au centre de lui-même, en-dehors de toute influence extérieure, positive ou négative. La petite pièce hexagonale permet alors de partir à la recherche de l'essence de l'individu, de ce qu'il est vraiment. Pour autant, est-ce à dire que tous y parviennent ? Sur ce point, nulle réponse, chacun devant garder dans le secret de son coeur ce qu'il y a trouvé. Interdiction de parler de ce qui a été dit dans la petite pièce hexagonale. Cela reviendrait à dénaturer son principe, à lui faire perdre toute son utilité. La petite pièce hexagonale, vulgaire boîte de bois vue de l'extérieur se veut alors le chemin vers soi. Personne ne peut le trouver pour nous. Parler de ce qui lui a été confié, c'est se fermer les voies ouvertes par la petite pièce.

La Petite Pièce Hexagonale est une courte nouvelle incitant à s'interroger sur les choix que nous faisons, sur ce que nous souhaitons, sur tous les actes de notre quotidien qui font ce que nous sommes. Mais elle interroge surtout notre capacité à pouvoir nous confronter à nous-mêmes et sur le courage qui peut parfois s'avérer nécessaire. Peur de la confrontation ? Peur de ce que nous pourrions y trouver ? Jusqu'où nous mentons-nous à nous-mêmes ? L'image que nous renvoyons est-elle fidèle à ce que nous sommes réellement ?
Lien : http://drunkennessbooks.blog..
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