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Citations sur Le corps et l'argent (13)

p.137.

Dans nos sociétés, on a tendance à penser qu’il est admirable de donner un rein ou un lobe de foie pour sauver une vie, et répugnant de faire exactement la même chose pour de l’argent. En France, la loi exprime ces normes. Elle interdit la vente d’organe en vertu d’un principe qui consacre la non commercialisation des éléments du corps humain, mais autorise le don d’organes entre proches en admettant ainsi que certaines parties du corps humain peuvent faire l’objet d’une transaction légale (ou d’un « commerce juridique »). Mais l’obligation de gratuité, l’interdiction de recourir aux organes anonymes de personnes éloignées de la famille a le désavantage de créer un système de « don forcé ».
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p.71.

Comme me le fait remarquer Patrick Savidan, on pourrait aussi se demander, dans le même esprit, s’il existe un certificat de capacité professionnelle de « Président de la République » et si l’actuel président l’a obtenu (et « mérité »).
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p.91.

Il en faut pas confondre ce qui choque et ce qui est injuste ou immoral.
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p.50.

1. La forme que pourrait prendre le sexe payé dans le mariage est, certes, un peu plus difficile à imaginer, mais elle n’est pas complètement inconcevable. On pourrait envisager une situation dans laquelle l’épouse déciderait qu’elle ne veut plus nettoyer la maison, préparer les repas, s’occuper des enfants et faire l’amour, sans recevoir une part déterminée des revenus de l’autre correspondant exactement à ce que ces activités coûteraient sur le marché. Il s’agirait d’une de ces « réappropriation du travail féminin » dont parle Paola Tabet à propos de la vente de services sexuels : « Cette réappropriation peut-être analysée comme une forme d’émancipation. Dans ce rapport explicite, le service sexuel ou l’usage sexuel considéré comme un dû par le groupe des hommes est au contraire fourni de façon contractuelle contre un paiement. Là réside la dimension de révolte contre la sexualité obligée. » : Paola Tabet, La Grande Arnaque. Sexualité des femmes et échanges économico-sexuel, op. cit., p. 105-106.
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p.33.

C’était une idée courante dans la critique sociale à la fin du XIXe siècle, selon Alain Corbin, qui cite un passage d’un article de la revue Temps Nouveaux de 1899 intitulé « Salaria et prostitution » : « Tout travail salarié est une forme de prostitution parce que, en louant son travail, c’est toujours son corps-muscles ou cerveaux qu’on loue »
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p.16-7.

Est-il juste d’interdire aux pauvres de vendre leur sexe ou leur corps si rien n’est fait par ailleurs pour améliorer leur situation économique ? Les réponses à ces questions ne sont pas évidentes.
Quant à l’argument de la dignité, il n’est pas certain qu’il parle très clairement contre la liberté de vendre son sexe ou son corps. En réalité, cet argument permet de justifier des causes parfaitement contradictoires, comme le montre le débat autour de l’euthanasie. Au nom de la dignité humaine, on peut aussi bien justifier l’interdiction d’aider activement à mourir des patients souffrants et incurables que le contraire. De la même façon, on pourrait, au nom de la dignité humaine, justifier la prohibition de tout commerce de son propre corps aussi bien que la liberté d’en faire ce qu’on veut.
Finalement, rien ne nous interdit de penser que nous devrions avoir la liberté de mettre notre corps à la disposition d’autrui contre un paiement, même s’il peut y avoir des divergences au niveau de sa justification philosophique.
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p.126-7.

Mais, en réalité, nous l’acceptons très bien dans le cas où des organes sont prélevés sur des personnes tout juste décédées, dont le consentement est seulement présumé, afin de les greffer sur ceux qui en ont un besoin vital.
Il ne faut pas oublier, non plus, que ce genre de taxation des corps est admis en temps de guerre sans susciter la réprobation générale. Les États ne se sont jamais privés d’utiliser les corps des jeunes gens sans leur demander vraiment leur avis, et de les renvoyer chez eux avec des membres ou des organes en moins (qui n’auront servi à personne).
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p.59.

Que devraient faire celles et ceux qui n’ont pas la chance de pouvoir vivre selon cet idéal ? Renoncer complètement à la sexualité plutôt que d’acheter du sexe ? Que devraient faire celles et ceux qui vivent dans la misère ? Mourir plutôt que de vendre du sexe ? La criminalisation et la condamnation morale de l’achat et de la vente de sexe n’ajoutent-ils pas une misère à une autre misère, sans contribuer le moins du monde à la corriger ? Pourquoi faudrait-il blâmer et harceler les personnes qui vivent du sexe rémunéré parce que c’est, à leur avis, le meilleur choix possible dans l’ensemble limité des emplois qui leur sont accessibles ? Pourquoi faudrait-il les punir lorsqu’elles refusent les tâches les plus abrutissantes et les moins bien payées ?
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p.110-1-2.

Pourquoi paie-t-on tout le monde sauf celui qui fournit le principal ?

En ce qui concerne la mise à la disposition d’autrui de parties de son corps (rein, poumon, lobe de foie, etc.) ou de produits de son corps (sang, sperme, ovocytes etc.), le refus d’envisager toute forme de rémunération par crainte de la « marchandisation » est souvent irréfléchi. Il y a, en effet, beaucoup d’argent qui circule dans ces activités, pour payer le personnel soignant et administratif, la maintenance des locaux et des instruments techniques, la rechercher et les laboratoires pharmaceutiques, etc. personne ne semble penser que c’est une expression ignoble de la « marchandisation » du monde. Le seul qui n’aurait pas le droit moral d’être payé ou compensé pour sa participation au processus thérapeutique serait le donneur. Pourquoi ? Pourquoi paie-t-on tout le monde sauf celui qui fournit le principal ?
Cette exclusion ne pose pas de problèmes si elle correspond à sa volonté. Mais si celui qui fournit l’organe estime qu’il pourrait être rétribué, pourquoi serait-il interdit de le satisfaire ? On ne peut pas se contenter de lui dire qu’il ne mérite aucune rémunération parce que, à la différence du personnel soignant et administratif, il ne travaille pas. En effet, il pourrait répondre qu’en vendant un vieux canapé dont il serait propriétaire, il ne travaillerait pas plus (et même plutôt moins) qu’en donnant un rein ou du sperme et pourtant personne ne trouverait injuste qu’il soit payé pour cette transaction. Si on lui rétorque que sa comparaison n'est pas pertinente parce que son organe ne vaut rien sans intervention médicale, du fait qu’il ne peut l’extraire et le transférer lui-même sans le détruire, il peut toujours répondre qu’il est prêt à payer une compensation au médecin pour son travail. Si, pour lui clouer le bec, on lui dit enfin qu’il n’est pas pleinement propriétaire de son corps et de ses éléments, car ce ne sont pas des choses à vendre ou à acheter, il pourra objecter que c’est précisément ce qu’il faudrait prouver contre les libertariens qui prétendent le contraire.
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p.85.

Il est vrai que, dans le cas du dentiste ou du gynécologue, le client paie pour l’invasion de sa propre intimité, alors que dans le cas du travail sexuel c’est l’inverse qui se produit : le client paie pour envahir celle d’autrui.¹

1. Merci à Martin Blanchard qui m’a proposé cette façon de formuler le problème.
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