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Critique de berni_29


Dans ce court texte, L'oiseau, écrit par Jung-Hi Oh, autrice coréenne, la narratrice est Umi, une petite fille qui raconte son histoire, à commencer par la mort de la mère.
Nous sommes en Corée du Sud, au moment où le pays tente de se relever de ses blessures passées, un pays en pleine reconstruction. Umi a onze ans et son petit frère Uil, neuf ans. Privés de leur mère, ils sont ballotés ici et là dans la famille maternelle, tandis que le père travaille au loin sur des chantiers.
Un jour, le père daigne les récupérer. Il revient les chercher en compagnie d'une jeune femme qui se voit endosser un peu malgré elle le rôle de mère. Ils vont habiter dans l'appartement d'un grand immeuble. Sans doute une lueur d'espoir naît alors dans le coeur de ces deux petits : celui de faire partie enfin d'une vraie famille... Mais le bonheur est de courte durée. Sous les coups du père, la nouvelle compagne s'en va... Et le père doit repartir vers les chantiers au loin qui l'appellent...
Alors, voilà les deux enfants seuls, presque livrés à eux-mêmes, et notre toute jeune narratrice se retrouve investie du rôle de grande soeur, de mère, de maîtresse d'école auprès de son jeune frère...
C'est une histoire presque ordinaire dans la manière de la raconter, à travers la chronique douce-amère qui nous vient ici comme la mélancolie d'un chant triste.
Dans l'univers de cet immeuble qui évoque parfois l'ambiance d'un huis-clos, formant le voisinage misérable, nous découvrons quelques personnages insolites qui apportent leur fantaisie mais aussi leurs fragilités au décor sombre et triste des pages. Cette petite communauté ressemble à une société brisée, sans illusions...
La nuit, bien calé contre le mur, si l'on y colle l'oreille, parfois on entend des larmes venir du tréfonds des étages.
Et puis il y a cet oiseau en cage dans l'appartement de Monsieur Yi, le voisin veuf, et qui fascine la petite Umi... Dans la cage il y a un petit miroir pour tenir compagnie à l'oiseau seul, qui lui aussi tient compagnie à Monsieur Yi, désormais seul...
Parfois les rêves de la petite Umi font du bruit, font surgir de l'enchantement, des visions oniriques d'un monde qui n'est plus ou ne sera jamais... Les rêves, c'est l'univers où l'âme peut vagabonder, le seul endroit où elle peut enfin déployer ses ailes, comme un oiseau épris de liberté, découvrir un monde meilleur...
Parfois elle est légèrement inquiète quand elle se réveille aux premières lueurs du matin, mais le jour la happe alors dans son élan frénétique et tout devient différent... Car il faut survivre. Il n'y a pas de place alors pour la peur...
C'est le portrait d'un monde désenchanté, dépeint à hauteur d'enfant, l'image d'une enfance enfermée dans une dure réalité comme celle d'un oiseau en cage...
Sous les regards compatissants, tantôt aveugles, tantôt impuissants, d'un voisinage misérable, nous cheminons avec Umi qui grandit trop vite, qui a déjà compris comment survivre avec les autres, même si elle ne sait pas trop bien s'y prendre avec son petit frère qui fait les quatre cents coups...
L'écriture de ce texte est de toute beauté.
Le ton, le propos du récit m'ont fait penser à La Tombe des Lucioles, de Akiyuki Nosaka, qui nous laissait voir le destin douloureux de deux enfants dans les décombres du Japon dévasté par la seconde guerre mondiale. C'est une chronique intime qui évoque la résilience de deux enfants et dont la teneur donne une puissance universelle au texte.
Mais il m'a manqué cependant un soupçon d'émotion, quelque chose qui m'aurait chaviré pour être en totale empathie avec ces deux enfants, mais en voudrais-je à cette enfant, la narratrice, qui tient le monde à distance pour mieux se protéger du malheur en embuscade ?
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