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Citations sur Presque rien sur presque tout (62)

Le temps n’est pas l’éternité. L’éternité est une absence de temps. Le temps est un refus d’éternité. Le temps a commencé. Il finira. Si le temps n’avait pas commencé, s’il ne finissait pas, il serait lui-même l’éternité.
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Le temps est le cœur du tout distingué du néant. Se pencher sur le tout, c’est se pencher sur le temps. Le temps est notre patrie, notre bien à tous, notre matière et notre âme. Il est aussi près de nous que l’éternité en est loin. Nous avons du mal à parler de l’éternité parce qu’elle nous est trop étrangère. Nous avons du mal à parler du temps parce qu’il nous est trop familier. Mais de quoi parler d’autre ? Le tout appartient à l’être qui l’a fait surgir du néant. Et il appartient au temps à qui l’être l'a confié.
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Pour l’esprit le plus obtus, rien de plus évident : le tout est réel dans le temps parce qu’il était possible dans l’éternité. Peut-être faut-il aller plus loin et dire que le tout est réel dans le temps parce qu’il était nécessaire dans l’éternité.
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Malgré les rêveries de philosophes qui réduisent l'univers à une création de l'esprit, le monde réel existe. Nous avons mal, nous avons faim, nous pleurons, nous sommes heureux.
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La vie est une grande surprise. Pourquoi la mort n’en serait-elle pas une plus grande encore ?
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Le temps est notre patrie, notre bien à tous, notre matière et notre âme. Il est aussi près de nous que l’éternité en est loin. [...] Le temps a commencé. Il finira. Si le temps n’avait pas commencé, s’il ne finissait pas, il serait lui-même l’éternité.
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Avant le tout, il n’y avait rien. Après le tout, qu’y aura-t-il ? [...] Les hommes arrivent très tard dans un monde déjà vieux. Hier soir. Ce matin même.
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Notre tout, celui dont il est possible et permis de parler, est un système d’une prodigieuse cohérence. Le plus surprenant, c’est qu’il y ait comme une harmonie et une correspondance secrète entre les lois de l’univers et les lois de l’esprit. L’homme découvre le tout, perce ses mystères, avance en conquérant dans la connaissance de l’immense univers qui se déploie autour de nous, monte vers des espaces de plus en plus lointains, descend, à la façon d’un explorateur en train de découvrir des régions inconnues, dans les abîmes d’un infiniment petit qui est comme l’image inversée de l’infiniment grand. Et il s’imagine avec simplicité qu’il répand de la lumière sur de l’obscurité. Il n’est pourtant pas acquis d’avance que le destin de l’homme soit de connaître l’univers et que le destin de l’univers soit d’être connu par l’homme. La clé secrète de l’affaire, c’est que l’homme ne peut jeter ses filets sur le tout et lui imposer ses catégories logiques et ses structures mathématiques que parce que le tout se les laisse imposer. « Ce qu’il y a de plus incompréhensible, disait Einstein, c’est que le monde soit compréhensible. » Comment ne pas être tenté de sauter, peut-être avec un peu de hardiesse et de précipitation, un pas métaphysique, comment ne pas se laisser aller à rêver que l’homme était fait pour conquérir le tout et que le tout était fait pour être conquis par l’homme ? Ne serait-ce que parce que l’homme est capable de penser le tout, il y a un lien caché, évident mais caché, entre l’homme et le tout. Il n’y a pas de rupture entre l’univers et l’homme qui en fait partie. Tout est lié dans le tout. L’attraction universelle et la gravitation ne sont que les conséquences et les symboles d’une cohérence et d’une unité qui rassemblent le tout, qui le font tenir ensemble, qui l’empêchent d’éclater et qui tissent un lien entre tout ce qui existe.

Ce lien est le tout même. C’est lui qui permet à l’homme de comprendre l’univers. C’est lui qui fait que la mathématique et les nombres sont à la fois, comme par miracle, dans la pensée de l’homme et dans la nature des choses. C’est lui qui inscrit les lois et leur nécessité dans l’espace et dans le temps.

C’est lui qui est au cœur de l’amour qui jette les êtres l’un vers l’autre. C’est lui qui fait courir comme un fil invisible entre les étoiles et la pensée, entre le big bang et l’histoire, entre le tout et chacun de nous.
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Les hommes continueront. Mais qui s’imagine encore que le progrès – ah ! le mot est lâché, on l’attendait celui-là, avec ses gros sabots et sa quincaillerie hors d’usage – les comblera de bonheur ? Autant et plus que jamais, ils vivront dans l’angoisse et dans l’incertitude. On pourra bien faire tout ce qu’on voudra, enterrer ou détruire les bombes, interdire les expériences et l’enseignement de la fission nucléaire, arrêter et fusiller les théoriciens et les praticiens de la physique atomique, les moyens de destruction sont à jamais parmi nous.

Et il est très douteux que personne ne s’en serve. On s’est servi de l’arbalète, proscrite comme trop meurtrière par le concile de Latran en 1179, condamnée par le pape comme diabolique et perfide. On s’est servi du canon. On s’est servi des gaz et des armes chimiques. On s’est servi de la bombe atomique. On trouvera mieux encore. Et on s’en servira.

Les décors où nous vivons ne sont pas là pour toujours. En doutez-vous, par hasard ? Sodome et Gomorrhe, et Troie, et Carthage se croyaient éternelles : elles ont été effacées de la surface de la Terre. New York aussi, et Paris, feront, un jour ou l’autre, des ruines très présentables que fouilleront des historiens et des archéologues. Et ils découvriront sur nous des choses peu vraisemblables.

La guerre n’est pas le seul moyen de faire périr les hommes et leurs œuvres. Il y a bien d’autres ressources : des rencontres, par exemple, avec des objets dégringolés du ciel que la science ne sera pas encore en état de détruire, ou des contagions intellectuelles, religieuses, mystiques, qui mèneraient comme par la main à des épidémies de suicides, dont nous avons déjà pu observer de très minces échantillons. Les progrès de la science permettent aussi d’imaginer des maladies qui laisseraient loin derrière elles tout ce que nous avons connu. Plus la science guérit, plus elle laisse aussi apparaître des formes nouvelles d’attaques contre la vie des hommes, plus recherchées. Plus résistantes. La peste, le choléra, la tuberculose, la variole reculent. Le sida leur succède. Le sida sera vaincu, personne n’en doute. Et de nouveaux monstres apparaîtront, personne n’en doute non plus, pour tourmenter les hommes et pour les détruire.
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Je suis l’être. Je suis. Je suis celui qui est. Le tout n’est pas.

Il existe. Il devient. Il naît. Il se transforme. Il finira bien par finir. Tout finira. Le Soleil, et la Terre, et la Lune, et toutes les galaxies dont vous avez plein la bouche et qui finiront, elles aussi. Comme finiront les hommes et ceux qui leur succéderont. Je ne finirai pas. Je suis l’être. J’étais et je serai. Je suis.

Les hommes sont le noyau de l’être. Ils en sont aussi le tourment. Parce qu’ils prétendent en parler. Le big bang, qui était autre chose que Michel-Ange ou que Newton, que Karl Marx ou le Dr Freud, quelque grands qu’ils puissent être, qui était même autre chose que tous les quatre mis ensemble et que tous leurs pareils réunis, ne se mêlait pas du tout. Lui, qui était le tout, ne se mêlait pas du tout. Lui, qui à lui tout seul était le tout du tout, ne parlait pas du tout. Et l’univers en train de naître n’en parlait pas non plus. Ni le Soleil quand il apparaît. Ni la Terre quand elle se met à tourner autour de son Soleil. Ni la soupe primitive. Pendant onze milliards d’années, j’ai été presque aussi tranquille que dans les temps bénis de mon éternité et de ma solitude.

Quand je dis onze milliards, je pourrais aussi bien dire quinze milliards. C’est d’hier, c’est d’aujourd’hui, pour parler comme les hommes, que datent mes premiers soucis. Et ce sont les hommes qui me les procurent. Durant quatre milliards d’années, la vie, qui jaillit du tout comme le tout avait jailli du big bang, me fiche une paix royale. Les algues bleues et vertes, les bactéries, les poissons, tout ce qui bouge dans la mer, les diplodocus, les primates, les oiseaux dans le ciel ne me causent guère plus d’ennuis que le tout en formation. Ils fonctionnent, ni plus ni moins, comme les corps célestes, comme les planètes, comme l’eau, si élégante, comme le feu, qui est si gai et qui bouge avec tant de grâce. Ils vivent, c’est une affaire entendue. Mais ils vivent en silence et avec modestie. Jamais un mot plus haut que l’autre : jamais de mots du tout. Ils nagent. Ils volent. Ils végètent. Ils respirent. Ils se nourrissent. Ils se taisent. Ils ne roulent pas dans leur sein de ces pensées accablantes sur le tout et sur l’être qui me sont maintenant infligées. Ils sont aussi innocents que la pierre sur le chemin.
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