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Critique de Sando


Sando
22 décembre 2022
Cette piscine souterraine, à laquelle on accède en acceptant de quitter le monde extérieur, représente pour “ceux d'en bas”, c'est à dire pour un certain nombre d'habitués, un élément clé dans leur vie qui leur permet de maintenir un équilibre, une stabilité, indispensables pour affronter la dureté de la vie à l'extérieur. C'est un univers régi par des règles tacites, où chacun vient chercher ce dont il a besoin tout en ayant la certitude de retrouver sa place. Une solidarité, une forme de complicité unit ces inconnus aux vies bien différentes mais qui se retrouvent sur un même pied d'égalité dès lors qu'ils sont en maillot et en bonnet de bain, partageant ce jardin secret commun. Mais cet univers s'apprête à imploser avec l'apparition d'une première fissure dans la paroi du bassin, menaçant la fermeture de cette piscine atypique et provoquant une vive inquiétude au sein de la communauté…

Est-ce parce que je ne suis moi-même pas une bonne nageuse que j'ai à ce point eu l'impression de ne pas être dans mon élément ? Je n'ai pas nagé dans cette piscine, j'ai plutôt ramé tant j'ai eu de mal à pénétrer cette lecture, à en comprendre le sens et le but! J'ai eu la sensation de boire la tasse et j'ai bien failli me noyer à plusieurs reprises dans cette piscine souterraine, au contact de cette communauté dont les préoccupations m'ont laissée de marbre... Plusieurs fois, j'ai songé à abandonner, tant le premier tiers du roman m'a paru fastidieux ! Aucune empathie pour les personnages, ces nageurs anonymes ou presque qui formaient un clan avec leurs règles à respecter. Un nom pourtant revient, celui d'Alice, vieille femme qui perd la tête à l'extérieur mais parvient à se retrouver au contact de l'eau chlorée. Pour autant, les descriptions et les états d'âme sont énoncés de manière si factuelle que je suis restée complètement en dehors.

Heureusement, les choses évoluent et prennent un tout autre tournant à partir du deuxième tiers du roman. On quitte alors la piscine, qui ferme définitivement ses portes en raison de l'apparition inexpliquée de ces fameuses fissures dans le bassin et l'on suit Alice dont l'état s'est largement dégradé depuis cette fermeture et dont le cerveau se nécrose et la mémoire se fissure, elle aussi (et là, on comprend soudain cette longue, loooongue métaphore de la première partie…). Diagnostiquée pour “une démence fronto-temporale”, la vieille femme se voit contrainte d'intégrer un EHPAD spécialisé dans la gestion de cas similaires. A travers une écriture clinique et avec beaucoup de cynisme, Julie Otsuka dépeint les conditions de vie déshumanisées dans ces mouroirs et les nombreuses règles, non tacites cette fois, qui vont dès lors régir le quotidien d'Alice. Aucune rémission possible, pas de traitement, juste un irrémédiable déclin, plus ou moins long selon les patients…

En abordant le dernier tiers du roman, on devine que Julie Otsuka nous parle en réalité de sa mère et qu'elle a choisi, par le biais de l'écriture, de nous raconter des bribes de son histoire, car, si la mémoire est défaillante, les écrits, quant à eux, restent pour témoigner. Cette dernière partie, bien que plus émouvante que le reste du roman, m'a tout de même parue assez froide. Moi qui avais été bouleversée par l'histoire de ces japonaises immigrées aux Etats-Unis dans “Certaines n'avaient jamais vu la mer”, je dois dire que j'ai été assez déçue de ressentir si peu d'émotions à la lecture de ce récit qui s'avère pourtant être des plus intimes… On sent la culpabilité de l'autrice pour son manque de présence auprès de celle qui l'a élevée et, peut-être, un désir de se racheter à travers ce roman. Néanmoins, le ton reste distant et manque de tendresse et de sentiments. Seule la relation de la mère avec le père a su m'atteindre et me toucher. En dehors de ça, j'ai l'impression d'être complètement passée à côté de ma lecture, dommage!
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