Citations sur Ce n'était que la peste (36)
Je voulais souligner l’idée que la peste n’est pas le pire des fléaux pour l’humanité, car les épidémies sont des processus naturels qui ne touchent pas seulement les êtres humains, mais également les animaux. Tandis que les épidémies de terreur que l’on observe de temps à autre dans les communautés humaines, elles, sont des créations de l’homme, et la nature ne prend aucune part à ces calamités.
—- Vous savez, je suis microbiologiste, j’ai bien peur que l’objet de mes études ne soit soumis à d’autres lois.
—- Mais nous sommes tous soumis à la même loi, la loi marxiste-leniniste !
—- Cela ne fait pas le moindre doute ! acquiesce Rudolf avec sérieux. Seulement mes microbes, eux, ne sont pas au courant.
Le monde change de façon imprévisible, et on voudrait espérer que cette nouvelle épreuve à laquelle est confrontée l'humanité ne va pas nous rendre plus fermés et plus égoïstes mais, au contraire, va nous faire prendre conscience que, dans ce monde qui ne fait désormais plus qu'un, s'il y a beaucoup trop d'agressivité, de haine et de cruauté, il n'y a en revanche pas assez de compassion et d'amour.
Et cela dépend de nous.
Et de nouveau le train. Cette fois il traverse des régions habitées de Russie centrale, il approche de Moscou.
Les faits sont là : c'est le NKVD qui a stoppé cette épidémie en se servant de sa riche expérience dans le domaine des arrestations et des "liquidations". En quelques jours, les employés de cette organisation ont établi une quarantaine draconienne. Si surprenant que cela puisse paraître, les organes de la sécurité de l'État se sont avérés plus forts que les forces maléfiques de la nature.
Cela donne à réfléchir...
« Et de nouveau un train qui roule à travers un désert enneigé .À la lueur des phares , des tourbillons de neige , des congères …..
Rudolf s’enveloppe dans la légère couverture du train, il met sa chapka en fourrure » …..
— Que se passe-t-il ? demande-t-il à sa femme avec anxiété .
— On est venu te chercher ! répond Ida, horrifiée.
— Qui cela ?
La question reste en suspens, elle contient déjà la réponse.
Cher camarade Staline !
Quand cette lettre vous parviendra, je ne serai plus de ce monde - je vais mourir de la peste, comme est mort il y a un instant un médecin de Saratov que j'ai isolé et dont je me suis occupé jusqu'au dernier moment. J'espère que cette épidémie sera stoppée et, si c'est le cas, je considérerai que j'ai donné ma vie pour le peuple soviétique . Ma position de condamné à mort me confère le droit, me semble-t-il, de vous adresser une demande personnelle. En juillet 1937, on a arrêté mon frère aîné, Sémyone Matveïevitch Sorine, directeur du chantier de construction d'une mine de charbon du bassin minier de Toula. Sa vie entière et son passé irréprochable de révolutionnaire sont tels qu'ils excluent les accusations qu'on a portées contre lui au moment de son arrestation. Je vous demande de vous pencher personnellement sur le dossier de mon frère.
L'humanité connaît depuis l'antiquité non seulement la cruauté de la nature , mais aussi la cruauté du pouvoir qu'elle a élaboré au cours de son évolution sociale . Un pouvoir peut être plus ou moins cruel , mais il a toujours pour fondement l'oppression de la liberté de l'individu au profit du bien de la société , un bien qui est parfois compris de façon arbitraire par le pouvoir lui-même .
Une question se pose avec une acuité nouvelle : quel est le mal le plus terrible -- celui des cataclysmes naturels et des épidémies, ou celui qui est généré par l'homme?