(Presque) jeune, (presque) jolie, (de nouveau) célibataire

Le premier baiser était le moment le plus important d'une relation. Instant précieux que l'on galvaudait avec ces rencontres faciles sur les sites Internet. Hormis avec Jonathan, ceux qu'on lui avait donnés ces derniers temps n'avaient été que de vagues passerelles vers un acte sexuel souvent bradé et déshumanisé, des sortes de tickets de rationnement pour une jouissance fugace et fragile. Les gens n'appartenaient plus à se connaître ni à se désirer. Ils se jaugeaient à l'aune de petites étoiles de popularité sur un profil, confrontaient les données statistiques d'une fiche que l'on pouvait remplir en rentrant le ventre, confondaient rencontre et casting. Les gens ne se rencontraient plus, ils se consommaient. À une époque où cela semblait facile, les gens ne se trouvaient plus eg crevaient de solitude. Plus on croyait communiquer, plus on était seul.

L'amitié, la vraie, supporte les kilomètres et les années qui passent.

On sous-estimait Le pouvoir du contact. Pourtant, une étreinte réparait tant de choses.

"Arrête de tourner autour du pot, je suis celle que tu cherches. Et ne lanterne pas, je ne serai bientôt plus sur le marché."
Avec un texte pareil, elle espérait bien attirer l'attention.

Tu te moques du regard des autres. Cherche à savoir ce que, toi, tu attends réellement de la vie et de quelle manière tu veux y parvenir. Tu te caches derrière une prétendue opinion que les autres peuvent avoir de toi. Mais tu ne pourras jamais obtenir l'assentiment de tout le monde.

En outre, depuis quelques mois elle ne focalisait son attention que sur le poids qu'elle avait pu prendre, doucement mais sûrement : les fameux kilos du couple. Ceux qui s'installent avec la routine. Ceux que Monsieur reproche facilement à Madame, occultant le fait qu'il a généralement hérité des mêmes. Les poignées d'amour masculines se déclinent en bourrelets disgracieux quand on les met au féminin. Se retrouver sur le marché du célibat alors qu'on n'était plus vraiment ni jeune ni jolie, il ne pouvait lui arriver pire tuile !

Ivana se rendit à la petite supérette du coin. Une légende urbaine prétendant que le supermarché était l'endroit par excellence où rencontrer l'homme de sa vie, elle remplirait son chariot à défaut de son lit.

L'amitié, la vraie, supporte les kilomètres et les années qui passent.

Son joujou électrique, lui, ne vérifierait pas la netteté de son épilation, ne ronflerait pas et ne se gratterait pas les couilles devant un match de foot. Le partenaire idéale, en somme.

Elle avait ensuite hésité entre plusieurs séances de cinéma : un film d'horreur sans personne à qui griffer le bras, un film comique sans personne avec qui rire et une comédie romantique sans personne contre qui se lover ? Décidément, la société n'était pas faite pour les célibataires.