L'enfance vous offre des paradis, le mien était là, si parfait, si intense en émotions, si chargé de ce bonheur que je poursuis encore, et qui par moments illumine mon parcours et me rend reconnaissante à la vie et au destin.
Le bonheur laisse des signes et des traces, quand on l'a éprouvé, on le poursuit avec la certitude qu'un jour ou l'autre on sentira à nouveau ce frisson, ce choc soudain sur la peau qui donne son sens à une vie ainsi que la conviction que cela a valu la peine de la vivre.
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Le bonheur laisse le signe, la trace, celui qui l'a éprouvé la suit avec la certitude qu'un jour ou l'autre il ressentira ce frisson, cette secousse soudaine sur la peau qui donne le sens à la vie et la certitude qu'elle vaut la peine d'être vécue.
Commencer à lire a été une expérience extraordinaire, presque un état d'abandon mêlé à la vigilance, qui me permettait de cueillir l'émotion d'une pensée, l’ambiguïté d'une idée , la sonorité d'un vers.
Il arrive parfois, quand on rencontre une personne, d'éprouver une sympathie instinctive, presque une tendresse qui vient de loin,comme se reconnaître frères du même sang, fils de le même mère: à moi cela m'est arrivé en rencontrant la maison.
Il me plaît d'avoir du temps à disposition, non pour gagner, améliorer, modifier, mais simplement pour le vivre et en jouir.
C'était déjà une maison quand j'y suis entrée pour la première fois et j'ai pensé que seulement ici j'aurais voulu vivre.
Ecrire est un extraordinaire moyen de connaissance: tu ne peux écrire si tu ne sais pas, et alors il devient nécessaire de regarder, observer les détails, trouver les expressions qui disent, communiquent, transmettent.
C'est beau de voir les choses depuis des perspectives diverses, particulières.
Je suis prudente depuis toujours, méfiante quand j'affronte des situations et des personnes, réticente à laisser ce qui pour moi représente la sécurité.
Je n'ai pas peur, je n'ai jamais eu peur. La maison exerce une sorte de protection à mon encontre et une action régénératrice qui me soulage lorsque le soir je reviens fatiguée : il me suffit d'entrer dans ma cuisine, allumer le feu et m’asseoir dans le vieux fauteuil à fleurs : c'est comme vivre un temps ferme qui n'a rien à voir avec le réel.
J'aime les maisons avec un grand nombre de petites pièces, de corridors, d'escaliers ; aujourd'hui, dans l'architecture intérieure, prévaut le règne de l'open space, on abat des cloisons, on élargit la fenêtres ; nous sommes exposés au regard des autres comme dans une vitrine. Ma maison, à l'inverse, est compliquée, celui qui y entre s'y perd entre les petites portes, les escaliers, les couloirs : les recoins secrets, les cônes d'ombre, les larges niches dans les murs qui s'ouvrent ou se ferment au-dessus ou dessous les escaliers, dans le grenier ou sous le salon, sont un voyage de l'esprit, du cœur, de l'âme : ils constituent un voyage à rebours dans le temps, un récit ininterrompu d'histoires lointaines qui s'entrelacent magiquement avec mon présent.
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