La sensualité s'invitera toujours dans ses écrits. Ses textes ont l'apparence d'un conte de fées, ourlés d'une réelle perversité.
"Eluard vous rejoint, ma belle Nusch ?
- Non, il écrit, comme toujours.
- Et Breton ?
- Le lion somnole dans le salon. [...]"
Elle pourrait rester allongée sous le soleil pour toujours. Elle écoute la rumeur des feuilles, le piaillement délicat de la fauvette qui perce l'air. La poétesse se sait cernée par le merveilleux. Elle ne le craint pas. Elle le désire, ce monde invisible qui abat le vulgaire quotidien, abolit la médiocrité et dissout le matériel dans quelque chose de plus grand. Oui, il y a une vie par-delà la vie apparente, Lise en est convaincue. La fauvette s'époumone dans les futaies. Un geai s'empresse de lui répondre. A ce moment-là, Lise en est certaine : tout doit être sourire et liberté, adieu les larmes. L'existence n'est que poésie.
Contrairement aux hommes, un idéal ne déçoit jamais.
Elle lui fait un clin d'œil, rien qu'à elle. Et Aude voit bien. Les yeux de sa grand-mère rient comme une petite fille.
Toutes les femmes aimées de Lise ont ce point commun d'être spirituelles, franches, élégantes et au-delà de la banalité. Les fameuses femmes longues et parfumées qu'elle cherche depuis l'enfance.
Au soir de la vie, le réel est le grand vainqueur.
Mais le ressentiment est plus fidèle qu'une bête.
Changer d'adresse, c'est un peu changer de mémoire.
Lise garde ce sourire énigmatique. Paul sait que tout ceci est un jeu pour elle. Il ne pourra pas changer la nature de Lise, celle de tout considérer à l'aune de son seul plaisir. Il est assez intelligent pour y entrevoir l'essence même du désespoir, une tristesse inconsolée, qui le bouleverse.