Je m'appelle Tracey Charles et j'ai onze ans. Je viens d'entrer au collège Jean-Lurçat qui se trouve tout près de mon ancienne école. L'école des Cosmonautes est la plus pourrie de la ville, tout le monde le dit. Je suis né en 1997 à l'hôpital Delafontaine qui est à deux cents mètres de l'école des Cosmonautes et à quatre cents mètres de mon collège. Cet hôpital a la plus mauvaise réputation du département. Il paraît que des trucs bizarres se passent dans les sous-sols. On raconte des histoires de bébés morts et de femmes à huit bras. Mais cette dernière partie est fausse, évidemment. Certaines personnes peuvent naître avec un tout petit bras minuscule sur le côté genre pince de crabe, mais c'est tout. Il ne faut pas non plus prendre des gens pour des imbéciles.
Prier ne changera pas la fin du livre mais, puisque la religion permet de demander l’impossible, autant ne pas se priver. C’est l’un des avantages de la foi.
J'ai créé une religion. La religion du Chiffre Huit. Pourquoi ce chiffre en particulier ? D'abord parce que je suis née un huit août. Ensuite parce que je pèse quarante-huit kilos pour un mètre cinquante-huit. Enfin parce que le chiffre huit évoque un corps féminin.
Après une demi-journée de séparation, on a encore plus envie de se voir. Le cœur bat, les jambes et les mains tremblent un peu. On sait qu'on est en vie.
"Même sans ça, on le sait, a souligné Rabah.
- Oui, mais là, on le sent. C'est mieux."
Cette semaine j'ai lu deux romans au pied de notre cerisier, la nuque pressée contre l'écorce. "Ma pauvre Tracey, à commenté maman, il faut vraiment avoir la tête en vrac pour lire dehors au mois de novembre. Remarque, j'aime autant que tu restes dans le jardin. Pendant ce temps là, on est tranquilles à l'intérieur."
Maman n'aime pas les faits, ils la privent de sa liberté de mentir.
"J'aimerais bien aller vivre chez mon père. L'idéal serait que j'emménage avant l'accouchement de maman parce que, mine de rien, j'ai déjà rêvé trois fois que j'étouffais le bébé. Les accès de violence sont mon plus grand problème."
Mamie ne m'a raconté son enfance qu'une seule fois. [...] Elle m'a expliqué que pour ses parents, le silence était la façon la plus directe de communiquer avec Dieu. Dès qu'elle avait le malheur de remuer le petit doigt, sa mère murmurait :
- Michèle, le bruit du tissu que tu froisses et du carrelage que tu foules sont des blessures que tu infliges au Seigneur.
Mais dans la vie, on n'a pas toujours le choix, voire jamais, je l'ai compris au fil des déceptions.
Une foi solide se passe d'ustensiles.