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Citations sur Atlas des reflets célestes (23)

"Avec le temps, son confortable gîte devient pour l'homme un piège perpétuel. Alors, coincé dans sa petite boîte, il s'avise de la fatalité de son illusion, mais, le plus souvent, n'a pas assez de force pour s'en affranchir, si bien que, se débattant frénétiquement pour essayer d'arracher son âme aux chaînes qui l'entravent, il voit périr son corps dans l'horrible souricière. "

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À ce jour, on n’a pas encore découvert les principes qui régissent la perméabilité de l’âme humaine. Alors que dans les unes tout s’écoule aussitôt comme à travers un tuyau sans rien ennoblir au passage, dans les autres pas une goutte de ce qui les pénètre ne ressort, comme si tout butait contre une plaque de granit. .......
.....Et puis, il y a celles qui renvoient dans le monde précisément l’essentiel et, qui sait pourquoi, gardent jalousement en elles l’insignifiant.
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Boîtes en fer blanc
Au début nous ne rangions pas nos souvenirs dans des boîtes. Nous les laissions simplement traîner partout autour de nous, en les poussant, les déplaçant et les oubliant pour un temps. On les tenait dans les fissures des murs, sous les tapis, parmi les vieilles choses remisées, dans les poches des manteaux que l’on ne portaient pas, entre les pages des livres, dans les armoires et les bouquets de fleurs sèches. Puis, quand tous les endroits « secrets » en regorgeaient, nous tombions quotidiennement sur eux, nous les retrouvions par hasard en faisant le ménage ou en cherchant une place pour de nouveaux souvenirs. Nous avons bientôt compris qu’un désordre pareil ne pouvait être plus longtemps toléré, et que nous risquions aussi de voir un souvenir important se perdre, se faire manger par les mites ou attaquer par l’humidité. C’est pourquoi, un samedi, nous avons organisé un grand ménage. Nous avons sorti tous les souvenirs à la lumière du jour, les avons brossés, exposés au soleil, puis enveloppés dans des morceaux de toile cirée, et pour finir rangés dans des boîtes à biscuits, à tabac ou à bonbons. Nous n’en avons jeté aucun (même pas le plus désagréable), car on ne jette pas les souvenirs, pour éviter qu’un jour puisse se trouver aux ordures une partie de nous-mêmes plus grande que celle qui nous reste. p 214
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Les cinquante deux ingrédients pour concocter huit amulettes :
Pour huit amulettes contre tous maux et toutes adversités, il faut réunir :
un reflet de la lettre alpha renvoyé par l’oeil gauche, un petit cercle né d’une libellule et de la surface de l’eau, une pincée de douce poussière de pollen, une écaille de voûte céleste pas plus grande que l’ongle d’un pouce, un bref froissement de surgeon d’if en train de croître, l’interdit éternel de se retourner pour regarder derrière soi, de la force germinale proportionnée aux porteurs des amulettes, une double dose d’espoir, la paire d’ailes d’un beau rêve, le froufrou d’un pigeon qui s’envole, un croisement de points de vue, autant de flocons de neige qu’il s’en peut poser sur de longs cils, autant de mots d’amour que peut en contenir une bouche, la valeur d’une narine d’immortelle, une bonne inspiration de chacun des quatre vents, autant que possible de lumière printanière, de l’immesurable ténacité d’un secret (…), un soupçon de couleur de papillon de jour, un petit bouquet de la magie d’un trousseau de clefs, une granule de froissement de scarabée,(…), un regard qui se perd entre les arbres d’une forêt, … un mouchoir d’ombre de figuier d’après-midi….
Tracer autour de tout cela un cercle et ajouter un reflet de la lettre oméga renvoyé par l’oeil droit.
p 53-54
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(…) le voyageur (= le lecteur) est libre de composer chemin faisant son petit atlas. Bien entendu, il lui revient de décider comment employer les matériaux disponibles, dans quel ordre construire, où prévoir les jointures, où percer des ouvertures, bref, à quel point orner l’atlas de son propre imaginaire. Le cartographe espère que les matériaux de construction proposés permettront de bâtir une demeure riche d’une vaste vue. Cependant, son plaisir ne serait pas écorné d’un sourire si, avec ces matériaux le voyageur bricolait un simple gîte d’une nuit, douillet et chaud. p 13
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Ce sans quoi on peut et ce sans quoi on ne peut pas dresser une carte.
Pour dresser les cartes, on peut se passer de bien des choses : chaîne, corde, pas, triangle, boussole, astrolabe, théodolite, échelle, compas, crayon, gomme, règle, micromètre, planimètre, rapporteur, curvimètre, longue-vue, planchette, éclimètre, jumelles, tachéomètre, quadrant, niveau, dioptre et sextant.
On ne peut pas dresser de carte sans courage.
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– La fantaisie ? demande Esther. – Qu’est-ce que la fantaisie ? La même chose que l’illusion ?
– Pas tout à fait. La fantaisie est quelque chose de bien réel, même si beaucoup de gens pensent qu’il n’y a rien derrière. Avec l’illusion, c’est tout le contraire qui se produit : il n’y a rien derrière ce mot, mais nombreux sont ceux qui voient en lui une réalité, a répondu Dragor.
– Tout ça me semble bien décoiffé, a dit Esther, déconcertée.
– Mais c’est ce qu’il faut, a fait Dragor avec un sourire.
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De temps à autre, dans un tiers du Miroir du Nord, nous apparaît la tante de Bogomil, Despina. On entend d’abord frapper, tout à fait comme le ferait un visiteur à notre porte, puis une voix fringante se fraye un chemin jusqu’à nos oreilles : « Bonjououour, il y a quelqu’un ? » Et pour finir une partie du miroir s’éclaire et découvre le visage de tante Pina. Elle est toujours d’humeur joyeuse, les seuls changements sont ceux de sa garde-robe ; selon le pays d’où elle vient quand elle se manifeste, elle porte un chapeau colonial, un manteau d’hermine ou un tailleur parsemé de fleurettes, et elle a une fois (ayant estimé qu’il s’agissait d’une urgence) « fait le voyage » en chemise de nuit de couleur rose. Volubile (une bonne partie de la famille dirait plutôt qu’elle est un vrai moulin à paroles), sans même attendre que nous soyons tous réunis devant le miroir, elle s’empresse de demander des nouvelles de la famille, relate quelque aventure, ne manque pas de raconter sa nouvelle histoire d’amour et, bien entendu, de se repentir de l’ancienne, désire savoir si l’on parle ici de son dernier exploit, avertit son neveu de se garder des refroidissements et, tout aussi subitement qu’elle a surgi du miroir, disparaît en nous laissant émerveillés par la détermination inébranlable avec laquelle elle s’occupe des choses les plus extravagantes qui soient au monde. Bogomil en a évoqué quelques-unes et elle nous en a fait connaître d’autres, par exemple : en Chine, Desmina s’est intéressée au croisement du papillon et du chrysanthème ; avec les chamans de Sibérie, elle a transformé des nuages en bons géants ; au sud de Marrakech, elle a rejoint une expédition lancée sur les traces d’un mirage égaré, celui du phénix, l’oiseau immortel ; dans les forêts du Brésil, elle s’est employée à exterminer les spectres des mygales ; à Riyad, elle a appris à tisser les tapis volants… En ce moment, elle se trouve dans un pays d’au-delà des océans où, avec une baguette de sourcier, elle cherche le point de jonction des trois temps.
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Bien que Sacha nous eût scrupuleusement prévenus qu’il serait raisonnable d’attendre l’avis des absents, le matin même, après avoir allumé la radio et jeté l’ancre au milieu d’un allègre ruissellement musical, puis bu un verre d’eau-de-vie d’abricot pour nous donner du cœur à l’ouvrage, nous nous sommes attaqués à la tâche prévue. Les manches retroussées des hommes n’avaient pas eu le temps de retomber que tout l’ameublement des pièces de l’étage se trouvait au rez-de-chaussée. Tout autour les femmes s’affairaient pour mettre soigneusement à l’abri les objets fragiles : vaisselle, vases, assiettes décoratives, flacons, tableaux, cruches, lampes de bureau, miroirs, médaillons, pots de fleurs, coupes, bibelots en porcelaine ; enfin, toutes ces choses qui n’ont pas l’habitude de déménager, si bien qu’au moindre déplacement elles font exprès de s’ébrécher ou, plus sournoisement encore, de se fêler.
Entièrement absorbés par l’importance de la tâche que nous venions d’entreprendre, nous ne pouvions songer à tout, si bien que nous avons complètement perdu toute notion d’effort. C’est peut-être pourquoi le plafond a été démoli avant que midi se fût épanoui en après-midi. Bref, les gouttes de sueur roulaient sur nos fronts, la fine poussière du mortier se déposait sur nos cils, le craquement des canisses brisées du plafond n’avait pas encore cessé de résonner à nos oreilles qu’au pied de la maison s’élevaient de grands tas rouges de tuiles ôtées du toit. (« Du bleu comme conséquence d’un travail mené à bien »)
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Il mérite une pleine coupe de reconnaissance sincère, le bel usage qu’avaient les anciens cartographes d’essayer leur plume sur la première page de leurs atlas avant de se mettre à en dessiner les cartes, et ce non seulement pour s’assurer du bon état de leurs instruments et de la fermeté de leur main, mais aussi pour aider en quelques mots le voyageur à se repérer dans ce qui l’attend. Comme notre plume est bonne – quelle joie de voir le pitoyable Vide reculer d’effroi devant sa pointe ! -, il nous reste à dévoiler un petit quelque chose (mais pas plus) de l’idée qui la guide. Peut-être ceci, qui peut tenir dans la paume d’une main tendue : les cinquante-deux chapitres sis à l’air libre, les cinquante-deux couloirs souterrains de notes diverses et les cinquante-deux planches modestement encadrées qui vont suivre ne constituent pas seulement un espace de lecture. Le voyageur peut aussi cheminer à travers ce territoire, suivre les sentiers balisés ou non, pénétrer dans des paysages existants ou inexistants, plonger pour voir le fond des eaux, s’accroupir pour examiner quelque herbette intéressante, se hisser sur la pointe des pieds pour observer un nuage silencieux… Et disons encore ici – car les rivières furent jadis des gouttes et les routes de simples sentes – que le voyageur est libre de composer chemin faisant son petit atlas. Bien entendu, il lui revient de décider comment employer les matériaux disponibles, dans quel ordre construire, où prévoir les jointures, où percer des ouvertures, bref, à quel point orner l’atlas de son propre imaginaire. Le cartographe espère que les matériaux de construction proposés permettront de bâtir une demeure riche d’une vaste vue. Cependant, son plaisir ne serait pas écorné d’un sourire si avec ces matériaux le voyageur bricolait un simple gîte d’une nuit, douillet et chaud.
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