Citations sur Rêve général (15)
(...) esquiver la petite vieille aux cheveux violets - attention, les vieux aux cheveux violets ne sont pas des punks, les gamins de la 4è3 se demandaient l'autre jour, non, ce sont des vieilles dames élégantes qui ne veulent pas avoir les cheveux blancs qui jaunissent, oui, car le violet est semble-t-il plus présentable que le jaune - (...)
(...) cuit à la vapeur, assure santé, joie, bonne conscience et surtout longévité, vivre plus longtemps, bien plus longtemps, quelle horreur, et sans alcool, et sans bonnes viandes grasses, tout gris et désséché par pur amour du sain, pauvre humanité perdue dans la détestation qu'elle a d'elle-même et de ses plaisirs, occupée à se hair et à s'imposer des régimes sans goût, sans plaisir mais si sains, pour soi, pour la Terre, pseudo-écoresponsables hérauts de la lutte pour la nature, la Nature cette douce nature réduite à deux ou trois stéréotypes, (...)
La scène politique aujourd'hui ne compte plus de Lop, elle les a remplacés par des crétins : ils parlent de pragmatisme, de réalisme, d'adaptation au contexte social et économique, se privant du même coup de tout projet susceptible de le modifier. il faut s'adapter au contexte et surtout ne pas le déranger, ne pas le pousser, pas même un tout petit peu, attention, ne le réveillons pas, il se facherait tout rouge, et alors là gare, horreur et damnation, les conséquances seraient imprévisibles mais prévisiblement désastreuses, alors, prudence, glissons-nous à pas comptés, suivons bien les petites bandes blanches réfléchissantes, ainsi pas d'accident, et le contexte pourra dormir sur ses deux oreilles.
Vie de labeur, labeur de vie, voleur de vie.
A moi le labeur, à toi le voleur, chacun son rôle, toujours le même.
Bonjour monsieur, ma vie ne me convient pas, je crois que je n'ai pas choisi le bon modèle, je voudrais l'échanger, je n'ai pas de ticket mais enfin vous voyez bien que tout cela vient de chez vous.
Mais bien sûr, madame, tout de suite, donc le modèle labeur ne vous convient pas ? Non je vais essayer le modèle voleur, s'il vous en reste bien sûr. Ah vous avez de la chance, en voici un, c'est dernier, ils partent comme des petits pains, on est dévalisés, un succès fou. Merci monsieur, ca sera parfait. Mais je vous en prie, bonne vie de voleur madame. Merci monsieur, au revoir.
Imaginons : on sonne ici chez moi, c'est pour une livraison, on m'apporte des sacs énormes, informes. J'ouvre. Dedans, tous ces bouts de vie que je croyais perdus. Evidemment, ils ont tout mis en vrac (...) et maintenant je fais quoi, moi de tout cela. (...) Allez hop, c'est décidé, je bazarde, je refile le tout à mon biographe, il fera le tri, après tout c'est son boulot, manquerait plus que je passe ma vie à ranger de vieux bouts de vie, et franchement, allez caser ça entre le lever et le coucher, non mais on croit rêver, ils pensent sans doute qu'on n'a que ça à faire, beh voyons, se lever, se coucher, entre les deux, vivre.
Il n'y a pas de place pour moi dans ta vie, et ma vie à moi ne peut se réduire à un petit rôle secondaire dans une pièce vaguement vaudevillesque.
Adieu donc, mon amour, mon étoile jumelle, ma douleur, je te souhaite d'être heureuse.
Il est vrai que protester à moitié n'a pas de sens. Protester du bout des lèvres, à quoi bon . Les mots, Lucien en est un peu fatigué. Il faudrait, se dit-il , mettre un peu la main à la pâte, les laisser un peu de côté, malaxer autre chose.
Louis
(...) ça et le reste. Comment dire. Un poste enviable, une carrière fulgurante, une popularité impressionnante, difficile de se plaindre quand on est ce qu'il est, Premier ministre d'une grande puissance, cinquante huit ans, autant dire la fleur de l'âge (...)
Il connaît pourtant bien la frénésie présidentielle, si éloignée de son propre flegme, de cet homme toujours tendu vers le plus, avoir plus, commander plus, s'agiter plus. (p..18-19)
Il sait que les histoires sont bien plus qu'un passe-temps, que les mots creusent des sillons qui ne s'effacent pas, que les coucher sur une feuille modifie le ronronnement de l'univers, qu'il n'a que trop tardé et qu'il doit s'y remettre vite.
Alors on fait quoi, maintenant ?
Comment ça, Lucien, on fait quoi, maintenant ? Moi ça y est, j'ai lâché mon torchon, j'ai pris une chaise, je crois que c'est déjà pas mal, non ?
Je ne sais pas trop, mas il va falloir, quand même, déboucher sur quelque chose, non ?
Déboucher, déboucher, toujours déboucher, avec des idées comme ça, tu vas nous remettre le nez dans le guidon en deux temps trois mouvements, mon pote, non mais respire(...)
On pourrait écrire - c'est Céleste, revenue de sa rêverie, qui intervient.