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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le Québécois Louis-Karl Picard-Sioui, membre du clan du Loup du peuple Wendat, régale son lecteur français ! L'éditeur a fait le choix de ne pas encombrer le texte d'équivalents français, juste un lexique à la fin. Et c'est un vivifiant plaisir que de cheminer dans les « charmants méandres » de la prose vivifiante qui jaillit sous nos yeux. On s'y fait très vite, d'autant que l'auteur écrit de façon très savoureuse, avec une énergie communicative.

Chaque chapitre peut se lire indépendamment, comme une nouvelle, autant de chronique de la vie de la réserve fictive de Kitchike, dans le Sud Québec, autant de personnages hauts en couleur que j'ai adoré rencontrer. Autant de tonalités différentes aussi, qui alternent, avec même des touches de fantastique et d'absurde ( des trous noirs envahissent l'appartement du bien nommé Jean-Paul Paul Jean-Pierre ). Louis-Karl Picard-Sioui butine différents niveaux de langage et de styles et c'est très réussi.

Cela peut donner une sensation de récit désaccordé, vite dissipée par la récurrence des personnages dans les chapitres consacrées aux autres. Ce filon narratif consistant à croiser les personnages rencontrés permet de proposer au lecteur plusieurs points de vue sur eux, de compléter notre façon d'appréhender leur psychologie et leur comportement, notamment quand tous défilent au Gaz Bar sous le regard truculent de Mme Paul, logorrhéique serveuse, qui sait tout sur tout le monde dans ce Clochemerle amérindien.

Derrière cette galerie très incarnée et vivante, le texte laisse apparaître en filigrane une véritable radiographie de cette communauté amérindienne fictive mais qui, au final, sent le réel et glisse vers la satire douce-amère. A Kitchike, deux familles se chicanent pour le pouvoir, et tout cela explose joyeusement dans le dernier chapitre «  La Grande débarque » autour du chef véreux Jack Saint-Ours, dénonçant corruption et favoritisme généralisés. Un autre chapitre ( "Pendant ce temps dans la ville avoisinante" ) épingle brillamment le racisme ordinaire subi par les Autochtones, en l'occurence un petit garçon venu acheter de la viande hachée chez le notable M.Viande.

L'auteur parvient à trouver un équilibre pas si évident entre loufoquerie et satire grinçante grâce à la tendresse et la poésie qui infuse subtilement. Les deux chapitres qui m'ont le plus touchés sont La Cage avec sa douceur mélancolique sur le temps qui passe, et L'Homme qui fait danser les étoiles, irrésistible rencontre autour d'un concert de guitare racontée comme une légende indienne.

A noter, comme à chaque fois avec les éditions Dépaysage, avec sa collection Talismans spécialisée dans la publication d'auteurs autochtones francophones ( merveilleux Michel Jean ), le soin apporté à l'objet livre est remarquable : beau grain de papier, tendres illustrations de couverture ( par l'artiste Olivier Mazoué ).
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Écrire sur la réserve, raconter sans réserve.

« Des siècles durant, on a écrit sur eux. Sans eux. Figures caricaturales d'une histoire fabriquée par les vainqueurs, ils n'avaient que le droit de se taire ». Dans sa collection Talismans, Dépaysage recueille la parole, l'histoire et la vie des peuples autochtones, racontée par ceux qui en sont issus.

Loin des souvenirs familiaux d'un Michel Jean, Louis-Karl Picard-Sioui nous embarque avec Kitchike dans un patchwork littéraire jouissif, où le quotidien d'une réserve fictive du Québec va se trouver chamboulé par un fait divers revanchard. Une intrigue en forme de prétexte pour nous plonger dans l'incroyable galerie burlesque des habitants de la réserve, « fruit du plus ancien gang bang colonial que la terre a connu ».

Dirigée par le grand chef véreux Jack Saint-Ours, le coeur de Kitchike bat essentiellement autour de ses deux lieux phares : l'église (celle des catholiques ou celle des pentecôtistes) et le Gaz Bar station-service-café-bazar où dans la grande tradition de la transmission orale, l'histoire se forge, se raconte et bien souvent, se déforme. Pour le meilleur, le pire, mais surtout, le drôle et le burlesque !

De Jean-Paul Paul Jean-Pierre, l'homme aux multiples prénoms dont la maison est envahie de « trous noirs » se multipliant à toute vitesse, à Roméo Coeur Brisé et Albin Pinancien gardiens des âmes de la nation, en passant par Madame Paul qui joue les aboyeuses pour annoncer avec humour et insolence chaque nouvel entrant au Gaz Bar sans oublier la bande de pieds nickelés associés aux magouilles de Saint Ours, le microcosme de Kitchike est une bombinette en fusion, qu'une étincelle suffira à faire voler en éclat.

Le verbe est haut à Kitchike, car comme le dit Jakob le Vaurien, « faut pas m'en vouloir, l'ironie c'est tout ce qu'on a ici pour pimenter notre vie ». Mais ce ton burlesque et enlevé n'est que le pendant d'une vie quotidienne socialement et économiquement complexe, dans cette réserve où la double peine des passages français et anglais n'a bien souvent laissé que désespoir et corruption.

Heureusement, il reste l'histoire et la tradition indienne, riche en imaginaire et en spiritualité, qui se poursuit et permet à l'auteur de superbes chapitres où l'esprit s'envole, où la lumière apparaît, où la musique révèle sa force cosmique et où la poésie embellit et réécrit sous un angle différent un quotidien souvent trop sombre, marqué par le souvenir de Diane au destin autrefois tragique.

Un dernier mot sur la langue, pour partie conservée dans sa rédaction originelle, qui surprend au début mais à laquelle on s'habitue très vite et qui devient alors un élément indispensable du plaisir comique jubilatoire de cette grande comédie où Louis-Karl Picard-Sioui se lâche sans aucune réserve !

Cette chronique t'a donné envie ? Câlisse ! Ne sois pas un grand crisse de blanchon-de-marde et que tes bottines suivent tes babines ! Fais pas ton pêteur de coches : file asteur et dépense quelques piasses pour Kitchike. Sûr qu'tu vas l'caler c'te fin de semaine avec plaisir !
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J'attends dorénavant avec impatience chaque nouvelle parution de la collection Talismans des Editions Dépaysage et le moins que je puisse dire c'est que je n'ai pas été déçue par ce 5ème roman. Quel savoureux roman !

Un roman qui prend la forme d'une collections d'histoires liées les unes aux autres et qui nous amène dans une réserve autochtone du Québec. A travers une galerie de personnages gouailleurs, l'auteur nous fait partager une tranche de vie de cette communauté. Il y a les désenchantés, les poètes, les mystiques, les corrompus, les farceurs, les séducteurs, les justiciers…
C'est Clochemerle outre Atlantique! Une incursion mémorable dans un univers où se côtoie les traditions et la politique, le désopilant et la mélancolie.

En s'appuyant sur la verve québécoise, l'auteur alterne les styles et les niveaux de langages pour donner corps à chaque personnages avec des dialogues qui sont des petites bombes. Ça donne un livre d'une grande vitalité, rafraichissant et un brin désespéré. Car la farce ne manque pas de fond. Derrière l'ironie, il y a la radiographique d'une société humaine et l'occasion de caricaturer avec beaucoup de goguenardise tous les travers de ses membres et du système.

Heureuse d'avoir découvert un écrivain à la si plume piquante. J'en redemande.
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Dans la réserve québécoise de Kitchike gravitent des personnages hauts en couleur que le romancier nous dépeint tour à tour au fil des chapitres. Des personnages hétéroclites qui nous permettent de nous immiscer dans le quotidien de cette réserve amérindienne fictive.

On y fait la rencontre du séducteur Pierre Wabush qui se réveille avec la gueule de bois, du vieux chamane Roméo Coeur-Brisé, de Jean-Paul Paul Jean-Pierre qui doit faire face à de mystérieux «trous noirs» ou encore de Madame Paul qui travaille au Gaz Bar et n'a pas la langue dans sa poche.

Les différents points de vue étoffent le récit et permettent au lecteur de découvrir les multiples visages de cette communauté autochtone. Si l'histoire semble plutôt éparse au départ, les personnages finissent par se croiser jusqu'au rebondissement final qui va les réunir et semer le trouble dans la réserve.

Une galerie de protagonistes très vivante que tisse l'auteur sur un ton ironique et mordant. La corruption, le pouvoir ou encore le racisme font notamment partie des piques lancées par Louis-Karl Picard-Sioui.

La poésie, la mélancolie et la détresse imprègnent également ce récit baigné de légendes contées par les Anciens. Car tout n'est pas rose à Kitchike, loin de là.

Une lecture agréable et dépaysante aux délicieuses sonorités québécoises.
Lien : https://mesechappeeslivresqu..
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A Kitchike se côtoient des personnages tous très différents. La communauté est traversée par l'influence de l'église mais aussi par le poids des traditions. Roméo,, le chamane se mesure à Albin le curé tandis que Pierre Wabush drague à tout va et apporte le scandale qui secoue la réserve. le chef Saint-Ours s'en trouve ébranlé et rien n'échappe à la très loquace Madame Paul, caissière du Gaz Bar. En périphérie, il y a la ville et le regard emprunt de condescendance et de curiosité des blancs. Les deux mondes vivent côte à côte sans réellement chercher à se comprendre.

Le roman prend des allures de recueil de nouvelles. Chaque chapitre fait entendre la voix d'un personnage et raconte une histoire presque indépendante des autres. Ce sont des tranches de vie souvent intimiste qui nous sont racontées. Suivant les narrateurs ou les points de vue, le ton change, la langue se fait mouvante. Parfois écrit dans un français très littéraire ou parfois émaillé de termes québécois, le texte nous immerge dans le coeur battant d'une communauté autochtone québécoise. A Kitchike on ne s'ennuie pas, il y a toujours une anecdote à se raconter au gaz bar ou la sortie de l'église. Reliés par des souvenirs et des traditions communes, tous vont être secoués quand le scandale va retentir.

J'ai beaucoup aimé la langue de ce livre que j'ai trouvé très inventive et vivante. On sent le soin accordé par l'auteur aux mots. Louis-Karl Picard-Sioui est un poète et un membre du clan du loup du peuple wendat. Il porte en lui un héritage riche et un goût pour la langue. Son texte est habité, vibrant d'humanité. Il manie l'humour comme l'émotion avec justesse et nous propose un texte en forme de patchwork de styles et d'histoires absolument délicieux.

Je ne peux que vous encourager à partir à la rencontre des habitants de Kitchike, un voyage à la fois drôle et émouvant.
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Tabarnak 🇨🇦

Une nouvelle plongée au Québec, une plongée réussie de nouveau. Une immersion totale, joyeuse, drôle, poétique. Un jeu de mots, d'expressions québécoises.

Louis-Karl Picard-Sioui nous plonge au milieu des autochtones du Québec avec une jolie parade de personnages dont nous faisons connaissance à travers des chapitres ressemblant fortement à des nouvelles. Tous ces personnages sont fictifs mais si réels en même temps. Dans cette communauté, on y trouve un chamane, des farceurs, des poètes, un chef, un séducteur. Toute une galerie haute en couleur.

L'auteur joue avec ses personnages et donne un ton différent à chacun, des dialogues chatoyants. C'est drôle, instructif, satirique, mélancolique. Oui, Louis-Karl Picard-Sioui sait donner corps entièrement à cette communauté.
C'est caustique sans être méchant. C'est caricatural sans être blessant. C'est satirique sans être dramatique. L'auteur écrit sur la société, sur sa vision non tronquée de la politique, de la justice. Une vision que nous avons peut-être un peu tous au fond. En ce moment, ce roman est encore plus à lire et à partager.

« Kitchike » est mon deuxième roman de la collection Talismans des éditions Depaysage (un troisième m'attend depuis de longs mois dans ma pal mais chut…) et c'est une collection que j'apprécie beaucoup (il faut dire que je suis amoureuse du Canada donc ça aide un peu !). Et leurs couvertures sont, point important, belles. Celle de « Kitchike » est d'Olivier Mazoué et je suis fan !
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Kitchike est une ville dans une réserve indienne au Canada (on dit "Première nation de Kitchike" maintenant). On y croise des indigènes autochtones plus ou moins satisfaits de vivre sous le joug du gros chef Saint Ours. L'auteur se glisse dans la peau de chacun avec facilité. Sa langue est franche et directe, poétique et variée. Ça m'a plu.
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