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Citations sur Africa Trek, tome 2 : Du Kilimandjaro au lac de Tibériade (30)

— Tu te souviens de cette phrase de Paulo Coelho quand il dit que « tout l’univers conspire à la réalisation de vos rêves » ?
Le nôtre est en marche grâce à cette petite conspiration mystérieuse du
matin qui a fait que nous sommes sur ces dromadaires plutôt qu’à nous
morfondre à Abri. [Ces conspirations] n’appartiennent elles qu’au monde du désert ? Non, mais dans la simplicité virginale de la survie, entre le sable et le soleil, elles y sont plus visibles. C’est tout. Dans le désert on ne peut être que croyant ou désespéré. Il n’y a pas de place pour les tièdes. Lors de notre retour, dans le bruit, l’opulence et la complexité, il faudra tendre l’oreille et ouvrir l’oeil pour les repérer ces silencieuses et discrètes conspirations. Elles seront là, sous des tonnes de choses superflues. Il faudra être vigilant. Ne pas les laisser tomber.
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Nous passons là quelques jours à cicatriser nos plaies et nos cœurs. Il
faut d’abord tirer au clair cette étrange fièvre. Mary, le médecin de la
mission, est tout de suite venue me faire un prélèvement sanguin. Elle
revient peu après avec le verdict :
— Malaria cérébrale. Un falciparum corsé ! Vu votre état de choc et
votre faiblesse générale, si vous ne vous étiez pas arrêté ici, vous auriez pu
être emporté en trois jours…
Elle est en Éthiopie depuis vingt ans et s’est spécialisée dans les traitements antipaludéens. Elle se félicite que nous ayons avec nous nos traitements de di-hydro-artémisinine, médicament que j’avais testé lors de ma première crise de palu, à Mitundu2 :
— Vous connaissez l’histoire de la di-hydro-artémisinine ?
— Oui. C’est un médicament chinois…
— Vous savez de quoi on le tire ? Vous voyez ma plantation de fleurs orange, là, dans le jardin ? Celles qui ressemblent à des gerberas ? Eh bien
voilà ! C’est ça qui sauve les vies ! C’est aussi simple !
— Comment ça ?
— Cette fleur s’appelle l’armoise amère. Je fais une simple tisane avec les pétales séchés et je sauve des gens par centaines…
— Et aucun laboratoire occidental n’a trouvé ça ?
— Héhé ! Vous mettez le doigt sur le problème ! Cette molécule est connue des Chinois depuis 1975. Ils l’ont découverte en soignant les blessés vietcongs rapatriés du Vietnam. Ce médicament a eu le malheur d’être
inventé par des communistes en pleine guerre froide : cela fait trente ans
qu’il y a un embargo dessus… Les Chinois ne demandent rien à personne et
soignent toute l’Asie avec. Les Indiens l’ont copié, il n’y a plus que nous qui nous obstinons. Pour le malheur de l’Afrique… Le vrai problème, en fait, c’est que ce médicament ne coûte rien alors que les traitements modernes développés péniblement par nos laboratoires coûtent les yeux de la tête. Entre un dollar et cent dollars, vous choisiriez quel traitement ? D’autant plus que celui à un dollar marche beaucoup mieux, vous l’avez testé vous-même n’est-ce pas ? !
— Mais l’OMS, les organismes internationaux… ?
— C’est là qu’est l’immense scandale, vous allez voir, cette histoire va bientôt nous péter à la gueule. Ils ont mis trente ans à s’intéresser à cette
molécule ! J’aimerais qu’on me dise pourquoi. Moi, par exemple, je dépends des organismes internationaux pour mon approvisionnement en médicaments. Vous le savez, l’Éthiopie est sous contrôle sanitaire de très
nombreux organismes. Et comme la di-hydro-artémisinine n’est pas reconnue officiellement, je n’ai pas le droit de l’importer…
— Mais qu’est-ce qu’ils avancent comme raisons pour la rejeter ?
— Oh ! que les tests n’ont rien prouvé, qu’ils sont toujours en cours, que ce sont des protocoles très lourds et très longs à mettre en place, qu’il faut la synthétiser, que c’est une molécule très complexe…
Nous sommes bouche bée. Comment des enjeux aussi importants
peuvent-ils être bloqués par des intérêts si piètrement marchands ? Mais
Mary positive :
— Remarquez, je me débrouille quand même, avec mes plantations. Mais vous allez devoir boire un litre de ma tisane par jour, et c’est vraiment très mauvais…
Je me remets de ma malaria en quarante-huit heures. Comme à Mitundu. Ça relève du miracle. En effet, ce médicament est vraiment dangereux pour l’Halfan, le Lariam et nos autres merveilles !… Trois mille enfants par jour meurent du palu, en Afrique. Combien, depuis trente ans ?
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À chaque re-départ, la même ivresse nous saisit. C’est pour nous un retour à la simplicité, au bonheur, après la complexité des rapports humains, les pertes de temps et l’engourdissement urbain. Suralimentation et confort nous épuisaient, à Arusha. Nous étions fatigués après une nuit de dix heures, fourbus après une journée d’ordinateur, affamés le soir sans avoir brûlé le moindre carburant, et nous nous demandions comment nous
faisions pour tenir avec cinq heures de sommeil, quarante kilomètres dans les pattes sous le soleil, et une soupe aux nouilles dans le ventre. Ce contraste est pour nous un mystère. La grande fatigue des sédentaires. Nous ne sommes pas les mêmes à la ville et en route. La sédentarité avachit notre esprit et notre corps quand la piste les affûte.
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La grandeur du pauvre. Nous étions soudain devenus minuscules, avec un cœur immense pour aimer la terre entière. L'amour est une réaction nucléaire.
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Si l'Homme avait été été modeste, nous serions toujours dans les arbres. (...) L'orgueil de l'Homme fait dieu.
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Le Nil

Chargé de limon rouge, il roule ses flots lourds
A travers les déserts.
Large comme une mer, il coule autant qu'il court
Sur la chair de la Terre

(...)

A ce brun narghilé ourdi dans le néant
Les hommes se raccrochent
Comme au sein d'une mer se raccroche un enfant
Dans un enfer de roches

(...)

Combien de prisonniers, de colonnes d'esclaves,
De défenses d'ivoire,
de sang versé sur ces rivages que l'eau lave ?
Il nous semble tout voir

(...)

Tout dort sous une pierre abrasée par le vent
Qui siffle entre les dunes,
Et le Nil éternel, sourd à tous ces tourments,
Miroite sous la lune.
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L'autre jour, j'étais embourbé, avec des passagers dans la voiture. Vous croyez qu'ils m'auraient aidé ? Ils attendaient, à l'arrière, que tout soit réglé. Quand je leur ai demandé de l'aide, ils se sont défilés. Ils avaient tous une soupe sur le feu. Aïe ! aïe! aïe ! J'ai vu alors passer des ânes et j'ai demandé si on pouvait les utiliser pour extraire la voiture. Un type resté avec moi s'est indigné : "Des ânes ? Tu es fou ? On a du respect pour nos bêtes ! Je vais chercher des femmes, elles sont moins difficiles à commander." De fait, une vingtaine de femmes sont arrivées qui ont sorti la voiture de l'ornière. Depuis cette histoire, je ne prends en stop que des femmes.
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Il y a vraiment un Dieu pour les marcheurs. C'est insensé comme les choses arrivent quand on se met en situation de les laisser arriver. Il s'agit d'être attentif, de les reconnaître, et d'y répondre. La vie nous porte autant que nous la menons.
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Et cette vieille dame dont nous n'avons pas retenu le nom, à peine le visage, qui se fond parmi tant d'autres dans des braises de pupilles auréolées de rides, nous révèle ainsi, que le dernier pouvoir, la dernière dignité de ceux qui n'ont plus rien est de donner, de recevoir chez soi. Et qu'il ne faut pas leur ôter cette dignité.
(...)
Si vous invitiez un millionnaire chez vous, est-ce que vous lui donneriez l'addition à la fin du repas ?
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Ici, deux mondes se regardent passer. L'Afrique en guenilles qui rêve de prospérité matérielle et de complexité, et le Nord prospère qui rêve de pureté originelle et de simplicité.
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