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Critique de soniamanaa


Varlam Kovrigina Prazanovitch.
Ne cherchez pas. Vous ne le trouverez dans aucun dictionnaire ni aucune anthologie.
Sous ce patronyme très dostoïevskien se cache en réalité un petit chat, trouvé par l'équipe de tournage de Mickaël Prazan le jour de don départ sur la route de la Kolyma. Par moins 50°, l'animal était quasiment mort. Il est ainsi baptisé par l'auteur en hommage à un autre Varlam, l'immense Chalamov, qui fût l'un des forçats de cette "route des ossements" au "pays de la mort blanche".
C'est sur les conseils d'une amie Sibérienne que Mickaël Prazan a lu les Recits de la Kolyma, l'oeuvre de Chalamov, quelque peu éclipsée en France par celle de Soljenitsyne. Cette lecture sera décisive pour entreprendre un tournage sur les traces de ces milliers de prisonniers exilés loin à l'est et au nord de la Sibérie, la région la plus froide de la planète où survivre était la première gageure.
Ce récit relate les coulisses du tournage de Goulag(s), documentaire sorti en 2018.

Pour qui a lu Soljenitsyne, Ehrenbourg, Mandelstam, Tsvetaieva ou Chalamov, il faut reconnaître que l'auteur ne nous apprend rien de nouveau. Son regard historiquement distancé donne à voir et à sentir une réalité qu'il ne peut qu'imaginer ou effleurer.
Le froid (-35°) qui les cueille à Yakutsk et s'amplifie jusqu'à Magadan ne sera jamais celui vécu par les déportés.
Tout, dans cette région de plus de 1200 km, a été construit à mains nus par les Zeks: villes, ponts, routes. Un chantier de plus de 20 ans pour servir tout à la fois la folie paranoïaque de Staline et des enjeux très économiques puisque cette région regorge d'or, d'étain et autres minerais rares. Prazan souligne ce point crucial dans l'histoire du Goulag. On a affaire à une entreprise techonocratiquement très organisée où la mort est banalisée, l'humain réifié, mais où la finalité est surtout économique et coloniale.

Mais le chat? me direz vous...
Lui et l'auteur vont mutuellement s'adopter. Varlam ira à Paris dûment muni de son beau patronyme et d'un passeport tout neuf. A contrario d'autres billets d'amis babeliotes, ces nombreuses pages sur l'animal ne m'ont nullement gênée. Comme l'auteur, j'ai vu dans cette rencontre improbable et miraculeuse un clin d'oeil malicieux de Chalamov, qui lui aussi décrivait dans "La chatte sans nom" sa rencontre émouvante avec un félin.
Ce livre m'a intéressée. Toutefois, je n'ai pas vraiment compris son pourquoi. le film Goulag(s) suffisait à témoigner de ce travail mémoriel.
J'avoue m'être souvent agacée aux desriptions de la splendeur des paysages ou à la place prise par les commentaires sur des conditions de tournage, il est vrai, dantesques.
Le film est excellent et je le verrai à nouveau.
Quant aux Varlam, ils occupent désormais une place commune sur les rayons de ma bibliothèque.
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