Ce monde fade. Ce monde artificiel, on y vit par procuration, a travers des journaux, a travers des ecrans, a travers tout. Je ne veux plus vivre comme ca, je ne peux plus. Je veux vivre une vie que je sens, que je touche, une vie odorante, plus aseptisee, une vie qui pue, qui hurle, qui saigne, une vie qui fait mal, mais une vie que tu sens passer dans tes arteres et dans tes tripes.
Nous etions quinze au depart de la demeure citadine du duc. Chaque soir, les Dib venaient chercher l’un de nous et, en un rituel dont l’horreur me labourait la raison, ils le devoraient avec un plaisir atroce. Apres Tilleul, les deux femmes et quatre gardes etaient morts.
Nous tous, les survivants, voyions approcher le soir avec une terreur grandissante, et meme Agol pleurait quand venait la nuit. Quant a moi, j’etais au-delà de toute humanité. Il me souvient avoir poussé un soldat devant moi pour que ce soit lui qui parte, happé par les griffes des Dib. J’entendrai toujours les hurlements qu’il avait poussés.
Brahe estime que les peuples qui ne respectent pas leurs vieux sont des peuples morts, car celui qui n’a pas de passé ne peut pas avoir d’avenir.