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Critique de Latulu


Avec plus d'un million d'exemplaires vendus et traduit en onze langues, Malpertuis est sans conteste la pièce maîtresse de l'oeuvre littéraire de Jean Ray.
Ecrit en 1943 et adapté au cinéma en 1971 par Harry Kümel, Malpertuis s'inscrit comme un classique de la littérature fantastique. Certains auteurs contemporains ne cachent pas l'inspiration que leur a fourni ce roman, tel Mark Z. Danielewski dans son excellent roman La Maison des Feuilles.

Malpertuis intrigue d'abord par son nom. Cette vaste demeure dédaléenne porte en effet la même appellation que le terrier du Goupil dans le Roman de Renard.
Dans le récit, le moine Doucedame ira même plus loin dans l'explication du nom de la maison, lorsque, à la faveur de leur premier dîner dans cette maison de cauchemar, il expliquera au jeune Jean-Jacques Grandsire : « Dans le célèbre et truculent roman de Renart, les clercs ont donné ce nom à l'antre même de Goupil, le très malin. Je ne m'avance pas trop en affirmant que cela signifie la maison du mal, ou plutôt de la malice. Or la malice est, par excellence, l'apanage de l'Esprit des Ténèbres. Par extension du postulat ainsi posé, je dirai que c'est la maison du Malin ou du Diable. […] La figure du renard appartient de droit à la démonologie. Les Japonais, qui sont maîtres en cette science sombre et redoutable, ont fait du renard un sorcier, un thaumaturge de grande puissance et un esprit de la nuit aux pouvoirs infernaux très étendus ».

Commence alors un séjour de cauchemar pour tout un groupe de convives attirés par la perspective d'un énorme héritage. Car l'Oncle Cassave, propriétaire de Malpertuis et d'une énorme fortune, se meurt. Autour de lui et conviés par lui, de lointains cousins, proches parents, fidèles serviteurs et médecin veillent. Et lorsque les derniers instants surviennent, l'Oncle Cassave est formel. En échange d'une confortable rente, tous les invités devront résider à Malpertuis jusqu'à leur propre mort.

Loin d'être linéaire, ce récit, construit comme un roman-mémoires, se compose de plusieurs textes qu'un observateur externe a compilé pour livrer toute l'étrangeté du destin de Jean-Jacques Grandsire. C'est en effet autour de lui que gravite toute l'horreur de Malpertuis. Les autres personnages permettent à Jean Ray de se livrer à une vive critique sociale en confondant apparence et réalité.
La dimension fantastique est abordée par la présence écrasante de la demeure et son architecture, les manifestations surnaturelles, la mystérieuse ombre qui avale la lumière et l'apparition de minuscules créatures humanoïdes. Cette dimension est renforcée par la peur de certains résidents qui semblent bien connaître les origines de tout ces évènements. Une certaine ambivalence se pose alors sur plusieurs personnages.
Jean Ray amène peu à peu le lecteur à comprendre qu'il s'agit bien plus qu'un récit fantastique.
La mythologie et la religion se croisent, se mélangent et s'affrontent. La collision brutale du passé et du présent éclate sous la loi inflexible du Destin : Moïra, au-dessus des désirs et des aspirations des hommes, au-dessus des volontés des dieux. Ce qui est écrit sur la roue doit s'accomplir...

J'ai passé un très bon moment avec cette lecture.
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