La vérité ne vaudrait-elle que lorsqu'elle nous montre ce que nous voulons bien voir? Quand elle nous apporte un soulagement face aux ravages de l'incertitude? Et si, au lieu d'un baume qui vient apaiser nos blessures, la vérité n'était qu'un autre acide, plus virulent encore?
« Lire était une défense, un bouclier pour pallier ses difficultés à communiquer.
Mais écrire était infiniment plus que cela. L’écriture était un palais, un gigantesque labyrinthe dont il arpentait, pieds nus et le sourire aux lèvres, les pièces secrètes où il s’arrêtait pour caresser des trésors . »
Ce jour-là, il plut sans discontinuer. Depuis presque deux semaines qu’il était en Galice, il avait appris à ne pas se fier aux promesses d’un ciel dégagé qui, en quelques heures, pouvait se couvrir au point d’anéantir tout espoir d’amélioration, mais il avait aussi assimilé le savoir propre aux gens d’ici qui leur permettait d’identifier les journées où il ne cesserait pas de pleuvoir. La pluie madrilène était nerveuse, rapide et impétueuse. Imprégnée de la saleté des trottoirs, elle filait vers les égouts et disparaissait de l’atmosphère lorsqu’elle cessait de tomber. Ici, en revanche, la terre absorbait l’eau, l’accueillait comme un amant avide et, quand la pluie s’arrêtait, sa présence demeurait dans l’air comme un spectre palpable susceptible de se matérialiser à nouveau à tout instant.
Lire était une défense, un bouclier pour pallier ses difficultés à communiquer. Mais écrire était infiniment plus que cela. L'écriture était un palais, un gigantesque labyrinthe dont il arpentait, pieds nus et le sourire aux lèvres, les pièces secrètes où il s'arrêtait pour caresser des trésors.
Manuel sortit de l'étude en respirant l'air de Galice, dont la fraîcheur inhabituelle le ramena à une réalité trop douloureuse pour lui permettre de penser. Il se sentit fatigué et affamé, les yeux meurtris par la clarté qui perçait entre les nuages, orphelin comme un voyageur de passage, perdu dans cette ville dont les rues ne voulaient pas de lui. Il s'en fut, loin de la lumière, des voix, du chœur antique qui poursuivait sa litanie dans sa tête.
En dépit de ce que peut bien en dire toute cette littérature vulgaire, la vérité est que dans la plupart des cas, les enfants sont une déception; naturellement, la majorité des parents ne l'admettront jamais, sans doute parce que reconnaître l'échec de leurs enfants reviendrait à reconnaître leur propre échec.
La douleur de l'incertitude est corrosive.
Lire était une défense,un bouclier pour pallier ses difficultés à communiquer.
« Deux paquets de feuilles et des stylos ». C’était tout ce dont un auteur avait besoin pour écrire un roman. Il en était persuadé parce qu’il l’avait expérimenté lui-même, parce qu’il savait que l’écriture naissait de la nécessité, de l’incomplétude de l’âme, d’une faim et d’un froid intérieurs qu’elle seule est capable d’apaiser, provisoirement.
La seule chose qui puisse libérer de la pire des souffrances un homme bon est la douleur d'autrui.