Au moment du Big Bang, l'entropie de l'univers était très faible. Depuis, elle n'a eu de cesse de se disperser. En règle générale, ce processus est irréversible. Il est en effet plus facile de casser un œuf que de le reconstituer. Il est plus facile de mélanger la crème au café, que l'inverse. Le mouvement de l'ordre au désordre suppose une perte d'énergie et le processus incessant d'expansion de l'entropie donne naissance à la flèche inflexible du temps.
Il serait vain de donner une définition scientifique correcte du mot "hasard" tant le terme revêt de multiples aspects, parfois contradictoires entre-eux.
Même si le hasard occupe une place importante, en créant perpétuellement de la diversité et en s'opposant au tri de la sélection, cette dernière travaille toujours dans la même direction ; celle de l'adaptation. Le vivant, c'est la sélection naturelle qui taille dans le hasard alors que celui-ci foisonne en permanence ; c'est une sculpture par sélection dans ce que produit le hasard. Le hasard en évolution n'est que la rumeur d'une promesse noyée dans du bruit ; sans la sélection naturelle, le hasard ne construirait pas cette nature qu'il fait bon voir.
(Les associations du vivant se font-elles au hasard ?)
De nombreuses hypothèses farfelues circulent sur la Toile pour "montrer" que la coïncidence n'est pas due au hasard, parmi lesquelles le fait que Kennedy serait une réincarnation de Lincoln !
Le déterminisme, thèse selon laquelle l'état futur du monde est une fonction de son état présent, implique que chacune de nos actions futures est déjà déterminée, déjà certaine, déjà écrite ; ce qui semble ne laisser aucune place à notre liberté d'action. Nous pouvons, de ce fait, facilement comprendre le soulagement provoqué par son abandon, au moment de l'avènement de la physique quantique, au profit de la thèse exactement contraire, l'aléa, selon laquelle l'état futur du monde n'est pas fonction de son état présent - semble d'avantage compatible avec l'idée que nous nous faisons de la liberté.
LE HASARD EST-IL LE PURGATOIRE DE LA CAUSALITÉ ?
Chacun connaît le principe de raison suffisante énoncé par Leibniz : "Rien ne se fait sans raison suffisante, c’est-à-dire que rien n’arrive sans qu’il soit possible à celui qui connaîtrait assez les choses de rendre une raison qui suffise pour déterminer pourquoi il en est ainsi, et non pas autrement."
Qu’est-ce à dire ? Que même si un événement ne semble pas avoir de cause identifiable, il en a tout de même une, nécessairement, mais que celle-ci nous est cachée, par exemple par notre ignorance. Ainsi la causalité agit-elle de façon plus ou moins souterraine en toutes circonstances, en amont de tout événement. Dès lors, il ne reste plus aucun espace pour la contingence, c’est-à-dire pour des événements qui pourraient aussi bien se produire que ne pas se produire.
L’idée même de hasard se trouve ainsi niée : l’invoquer à propos de tel ou tel événement qui paraît inopiné, ce ne serait jamais qu’admettre avoir échoué à identifier sa cause, à la fois inconnue et réelle. Le hasard correspondrait en somme à une sorte de purgatoire apparent de la causalité, à une construction artificielle entièrement fabriquée par nos
limitations cognitives : si nous croyons qu’il joue un rôle, c’est simplement parce que nous sommes aveugles aux raisons cachées, qui déterminent la suite des événements.