Une époque formidable

Kiley Reid nous propose ,dans ce premier roman , un tableau salé de la société américaine, enlisée dans ses préjugés et son mal être récurrent face au politiquement correct.
Elle met en scène des femmes ancrées dans leur époque, pour la plupart joyeuses et pleines de vie. Il y a d'un côté les New-Yorkaises d'Alex Chamberlain et de l'autre les Philadelphiennes d'Emira Tucker.
Alex est une trentenaire mariée mère de deux fillettes, elle est blanche nantie et obsédée par le regard des autres et l'image qu'elle renvoie. de blogueuse elle est devenue influençeuse grâce à son talent épistolaire, qui lui a ouvert les portes de la renommée numérique.
Emira a vingt cinq ans, a terminé ses études, est transcriptrice pour un groupe écolo et est la baby sitter de Briar, 3 ans la fille aîné d'Alex. Elle est noire, peine à joindre les deux bouts mais est soutenue sans faille par son groupe d'amies métissé, pétillant et protecteur.
C'est autour d'une mésaventure que l'intrigue se met en place. Elle se situe dans un quartier chic de Philadelphie où Alex a dû s'expatrier. Emira, en compagnie de Briar, est interpellée dans un supermarché par un vigile suspicieux, imaginant un éventuel enlèvement. L'altercation qui s'en suit est filmée par un passant.
Alex qui perd confiance en elle loin des lumières de the Big Apple, projette alors sur Emira une excessive empathie pour gagner son estime et plus si possible. L'intérêt tient alors sur tous les efforts déployés par la femme blanche pour conquérir le coeur de la femme noire, qui elle de son côté à l'innocence de la jeunesse, sa pureté aussi car Emira est un personnage spontané qui ne calcule pas ses élans.
D'autres personnages intéressants traversent le roman.
Kelley, l'amoureux blanc d'Emira traité de « fétichiste » de noirs, parce que ses amis et ses amantes sont tous noirs. Et la petite Briar « le petit être humain préféré » d'Emira dont les réflexions magiques que le monde lui l'inspire, émerveillent le texte.
La tension monte progressivement dans le roman . le début un peu léger cache une belle évolution de l'intrigue et des aspects psychologiques des protagonistes. L'intensité monte jusqu'à la scène finale, un régal de dialogues et de rebondissements. Un peu comme si dans « Autant en emporte le vent » Rosa Parks avait chuchoté à l'oreille de la nounou.