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Critique de lebelier


Titre original : A Judgment in Stone.

George et Jacqueline Coverdale sont des bourgeois aisés qui vivent au domaine de Lowfield Hall, vaste manoir où ils ont besoin d'engager une bonne. Les enfants Melinda et Giles sont demi-frère et demi-soeur car ils sont issus d'un précédent mariage de chaque côté, vivent aussi à Lowfield Hall.
Dès la première phrase du roman, Ruth Rendell installe le climat d'un destin implacable qui ne tient par la suite qu'à de petites choses : on sait que toute la famille va mourir assassinée par la bonne, Eunice et la narration va remonter le temps pour retrouver le fil des évènements qui s'enchaînent avec une rigueur mathématique. Il faut savoir qu'Eunice ne rechigne pas à l'ouvrage et apparaît les premiers temps comme une perle. Mrs Coverdale est ravie et George, bien que ressentant un malaise dès le départ ne veut pas gâcher le bonheur de sa femme. Prenant le lecteur à témoin, la narratrice explique comment les Coverdale furent les artisans de leur propre perte et que le lourd secret d'Eunice, son incapacité à lire et à écrire, dès qu'il se fait jour, la rend plus meurtrière que jamais. le personnage lui-même est un bloc compact d'insensibilité :
"une pierre qui respirait, voilà ce qu'était Eunice. Ce qu'elle avait toujours été."
mais rendue paranoïaque à l'idée qu'on puisse découvrir son "infirmité"; elle fuit livres et magazines comme la peste, la moindre note écrite lui paraît une source infinie d''ennuis, bien plus que le ménage de la grande maison . Ce bloc de pierre trouve son écho dans la scène du meurtre où les victimes sont rassemblés pour écoutant le Don Juan de Mozart à la télévision, qui a pour sous-titre « le festin de pierre", allusion à la statue du Commandeur qui emporte Don Juan dans les enfers, les protagonistes s'identifient chacun à un personnage. Ruth Rendell parsème des allusions littéraires, notamment le Shakespeare du « Conte d'Hiver» ou du « Marchand de Venise ». le rôle de la folle postière et épicière, obsédée par un rachat improbable dans une secte, Les Adorateurs de l'Epiphanie, transforme sa rédemption en meurtre et se pose en soldat du Christ qui tue les impies, inventant à l'occasion ses propres citations bibliques comme elle invente ses médisances. le fils Giles, jeune adolescent byronien, amoureux platonique de sa demi-soeur, elle-même un peu caricaturale en étudiante gauchiste, cherche sa voie chez les sages hindouistes puis vers la religion chrétienne et parsème le tableau de feutre de sa chambre de citations sibyllines qui semblent autant de provocations pour Eunice .
Le film de Chabrol, « la cérémonie », s'inspire du roman à la sauce française. Eunice devient Sophie et l'incarnation de Sandrine Bonnaire- au visage admirablement fermé - lui donne vingt ans de moins. La fin est aussi plus brutale tandis qu'après la mort des Coverdale, le roman continue et l'enquête policière se résume ainsi à une vingtaine de pages avec les fausses pistes et là encore, des coïncidences, des petits faits comme par exemple le mot "enregistrement" (au magnétophone) confondu avec le mot "disque 33t", chose impossible en français mais que l'anglais désigne du seul mot de "record". En ce sens la traduction pèche un peu et l'on y trouve quelques anglicismes "présents" pour "cadeaux" ou encore plus étrange "pour dire le moins" au lieu de « le moins qu'on puisse dire"... Reste un roman très prenant qu'on ne veut pas lâcher de si tôt tant l'auteure a réussi un petit chef d'oeuvre de cohérence dont bien des auteurs de « littérature » pourraient s'inspirer.
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