Mon père m'a menti en me faisant croire que je pouvais choisir de venir avec eux. Il avait déjà choisi à ma place. La malle vide au sous-sol en est la preuve.
Jason m'a laissée croire ce que je voulais croire.
Ce vaisseau tient par de l'acier et des mensonges - soit on ment, soit on est trompé.
Elder, lui, ne ment pas.
Mieux vaut avoir aimé et perdu ce qu'on aime que n'avoir jamais connu l'amour.
"Harley" - Je peux me rapprocher encore, me dit-il, presque suppliant.
"Elder" -Non! je m'écrie.
Il appuie sur "Entrée". La porte extérieure de la trappe s'ouvre et Harley est aspiré dans l'espace.
Un instant, il me regarde et son sourire est un au revoir.
Puis il se tourne vers les étoiles.
Et s'envole.
La porte de le trappe se referme, sur rien.
Harley est parti.
Eldest pense que contrôler, c'est diriger, et que la meilleure façon de diriger, c'est de forcer les autres à obéir. Mais alors que j'étreins Amy, je me rends compte que diriger, ce n'est pas contrôler. C'est être fort. Un bon chef, c'est quelqu'un qui donne aux autres la force de se débrouiller seuls.
Quand je sors de l'ascenseur, les conversations s'estompent. Je les laisse avec leur murmures et leurs mensonges. Je me fiche de ce qu'ils pensent. C'est ce que pense Amy qui m'importe.
Une tâche marron maculé le seuil de sa chambre: la trace des fleurs écrasées que j'ai déposées pour elle.
Je frappe à la porte.
J'ai juste envie de les voir. Rien d'autre.
Je me relève, saisis la poignée du numéros 40, ferme les yeux, tire sur la porte. Sans regarder le corps congelé à présent exposé, j'ouvre aussi la cellule numéros 41.
Les voilà.
Mes parents.
Du moins... Leurs corps. Sous une couche de glace bleutée.
Il fait très froid dans la pièce : je frissonne. Les caissons en verre sont givrés. Je passe la paume au-dessus du visage de ma mère.
- J'ai besoin de toi, je murmure.
Mon souffle embue la surface vitrée. Je la nettoie d'un revers de main.
- J'ai besoin de toi ! je répète. Tout est si étrange, ici, et je n'y comprends rien et j'ai peur. J'ai besoin de toi. De vous!
Je tends la main derrière moi. Elder est toujours là, à côté de moi. Depuis toujours. De nouveau, il essaie de me prendre la main. Je l'en empêche.
Je ne suis pas encore prête.
Mais... si ma vie sur Terre doit prendre fin, qu'elle se termine sur une promesse.
Sur une note d'espoir.
J'enroule mon petit doigt autour du sien. Il l'enserre, et le monde ne me paraît plus aussi hostile.
-Tu resteras toujours avec moi? je murmure.
-Toujours.
La terrible réalité de ce vaisseau me frappe d'un coup.
Ici, il n'y a nulle part où s'enfuir.
J'observe les étoiles. Parce qu'elles sont nombreuses, elles ont l'air proches; cependant je sais qu'elles sont à des années-lumière les unes des autres. Elles ne peuvent pas profiter de la chaleur de leurs voisines, même si elles sont en fusion permanente. Voilà la vérité des étoiles. Au final on est seul. Malgré notre proximité apparente, personne ne peut nous toucher.
- Je sais que c'est difficile pour toi.
- Difficile ? Difficile ? Vous ne savez pas ce que ça a été : Vous n'avez pas idée de la durée pendant laquelle j'ai souffert ! Et tout ça pour rien ! RIEN !