Je me sens comme si j'étais brisée en deux.
Une fois, j'ai été glace.
Maintenant, je suis Douleur.
- C'est toujours sous la pluie, murmure t'elle. Avec Jason aussi.
Et qui que soit ce Jason, j'ai envie de le tuer.
Tout est faux ici. Cassé. Brisé.
Comme la lumière.
Comme moi.
- Quand tu seras là-bas, pense à moi lorsque tu regarderas les étoiles.
- Je ne me limiterai pas qu'aux étoiles.
- Il n'aime pas le désordre, dis-je à Amy. Il n'aime pas ce qui est différent. D'après lui, la différence est le premier facteur de discorde.
- Un vrai petit Hitler, celui-là, marmonne-t-elle.
Que veut-elle dire ? Eldest m'a toujours affirmé que Hitler était un chef éclairé, un meneur d'hommes avisé et sage. Peut-être que c'est ce qu'elle veut dire ? Que le Doyen est un bon chef, comme Hitler ? Sa tournure de phrase est simplement originale - encore une chose qui nous distingue.
"L'un des premiers enseignement d'Eldest portait sur les religions. Que des histoires de magie, des contes de fées, et je me souviens avoir beaucoup ri quand il m'a appris que sur la Terre il y avait eu des gens capables de mourir ou de tuer pour défendre ces personnages imaginaires."
Elle fait un pas en avant et je l'imite; nous sommes bien trop près l'un de l'autre.
Il n'y a plus que la pluie entre nous.
Il n'y a plus rien entre nous.
Mes lèvres fondent sur les siennes. Une goutte de pluie court le long de ma bouche et elle entrouvre les lèvres; moi aussi. La goutte tombe sur ma langue, puis se perd sur la sienne.
Je suis trempé. Je devrais avoir froid. Mais la chaleur qui émane de son corps me réchauffe.
Je l'enveloppe dans mes bras, la serrant contre moi. J'ai envie de l'écraser contre moi.
Faites que ça ne s'arrête jamais !
Je plaque mon visage sur la surface froide et respire la poussière qui s'est accumulée sur les rivets. J'ai les yeux qui brûlent, je ne vois rien d'autre que le gris de mon univers métallique.
Quelque chose à l'intérieur de moi se brise.
Je m'apprête à protester. Ses grands yeux vides et innocents m'indiquent que ça ne servirait à rien. Je frissonne, et ça n'a rien à voir avec le fait que j'ai froid. Le Doyen exerce sur ces gens un contrôle absolu. Cette fille est tellement soumise qu'elle refuse de croire ce qui saute aux yeux parce que cela va à l'encontre de ce que dit le Doyen. J'ignore si c'est bien lui qui s'en prend aux congelés. Mais si c'est le cas, je n'ai aucune chance de gagner le duel : il a un vaisseau entier de gens qui le suivent aveuglément.
-Tu resteras avec moi ? je murmure
-Toujours