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Citations sur GPS (23)

Les explications sont des impasses. On peut se suicider à cause d un drame, ou d un accroc tout à fait anodin. Parce qu' on en a marre de perdre aux jeux à gratter, parce qu' une chanson de Céline Dion a envahi notre cerveau, ou qu' on a la flemme d imaginer une autre vie.
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Si tu devais faire la cartographie du chomage, tu dessinerais un unique point perdu au milieu d'une carte que tu ne sais pas lire.
Tu t'accroches au point. Il te donne une destination. A la fin de son voyage, il viendra à toi, et tu sauras comment réorienter ta vie.
Le problème du chomage ne se pose pas dans un GPS. Les gens qui y habitent sont des gens stables.
Il ignore que pour toi l'extérieur n'existe pas, que tu investis un nouveau territoire chaque jour.
A chaque fois que tu écris, c'est pour le monde intermédiaire qui est le vôtre. Tu l'appelles 33 ème région. 33 parce que c'est votre âge et que tu aimes ce chiffre. C'est comme cela que tu penses au GPS à présent....A défaut de te permettre de respirer l'air dehors, Sandrine t'a ouvert les portes d'un double du monde.
Il faut que tu enterres ce point. C'est ta mère qui te le dit, Antoine aussi.
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Le point va toujours à droite, tu te demandes s'il sait où il va, ou s'il erre selon cette contrainte que pourrait donner un GPS détraqué : prendre toujours à droite, jusqu'à la fin du monde.
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Entre le moment de la photographie en 360° d’un lieu et son apparition sur Google Maps, il se déroule plus de six mois. Si une bombe nucléaire ravage ta ville, elle restera intacte sur la carte pendant deux saisons. Cette pensée te rassure.
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Tu voudrais supprimer les souvenirs que tu ne peux plus partager comme des photos ratées.
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Entre le moment de la photographie en 360°, il se déroule plus de six mois. Si une bombe nucléaire ravage ta ville, elle restera intacte sur la carte pendant deux saisons. Cette pensée te rassure.
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Le paysage semble s’être comme Sandrine offert une opération de chirurgie esthétique. Tu apprécies ce monde, sans météo, sans contrainte, sans choix.
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C'est quelque chose que vous pourriez faire ensemble, résoudre le meurtre de ta meilleure amie en ligne. Une activité de couple moderne, comme s'inscrire sur les réseaux sociaux échangistes, s'engueuler sur Twitter et faire des Zooms avec des amis communs pour l'apéro. Il pourrait être ton allié. Tu imagines Antoine aller sur le terrain pendant que tu le guiderais via l'interface du GPS.
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(Les premières pages du livre)
C’est comme si Sandrine t’avait tendu un piège. Un piège malsain : Tu es attendue à 19 h pour mes fiançailles, Zone Belle-Fenestre. Arrive bien à l’heure.
Tu as tapé sur ton GPS : « Zone Belle-Fenestre », puis « Lieu pour se fiancer Zone Belle-Fenestre ». Il a répondu deux fois : adresse inconnue.

Il suffit qu’un numéro manque, et l’adresse devient incompétente. Une mauvaise adresse peut mener quelqu’un comme toi à sa perte. Les exemples sont légion. Une erreur dans le nom du destinataire fait qu’une amende ne parvient pas à bon port et devient une dette à vie. Une étourderie, et les urgences arrivent trop tard pour réanimer un père, laissant deux enfants orphelins avec ce regret éternel : si seulement le digicode n’avait pas changé.
Ou encore : un tueur à gages mal informé se trompe d’étage, entre chez toi et non chez ton voisin pour t’abattre d’une balle en pleine tête.

Bien sûr, rien de tout cela ne t’est arrivé. Mais parfois, tu imagines tellement fort que tu ne sais plus différencier la réalité de tes fictions. Tu te laisses envoûter. Tu divagues dans ta tête. Tu divagues dans l’espace. T’orienter est un vrai casse-tête. Depuis ton chômage, cette tendance s’est accentuée, mais elle n’est pas nouvelle. Tu es née à l’envers, dévoilant d’abord tes fesses au monde, en dépit de l’ordre établi et de la bienséance. La plupart des enfants se retournent dans le ventre de leur mère pour arriver dans le bon sens. Pas toi ; ta tête n’a pas trouvé l’issue.
Les trois dernières fois que tu es sortie de chez toi, tu t’es effondrée sur le trottoir. Tu n’arrivais pas à respirer dehors. Tu avais demandé à Antoine si les incendies de la région avaient pu abîmer l’air à ce point. Il avait paru sceptique. Ça pouvait jouer, la pollution aussi, mais ça n’expliquait pas tout. Il avait à nouveau parlé de la nécessité d’aller voir un psychologue, ou, au moins, un allergologue.

Tu as beau chercher, le nom de Zone Belle-Fenestre ne t’évoque rien. La Zone Belle-Fenestre est pourtant proche de chez toi, et tu es une enfant du pays. Tu n’as jamais quitté la région, si ce n’est pour de courtes vacances, ce qui en trente-trois ans t’aurait laissé le temps d’en arpenter chaque paysage. Mais les paysages ne t’intéressent pas. La ville non plus. Toutes les villes se ressemblent, affirmes-tu. Deux personnes équipées de la fibre et abonnées à Netflix ont plus en commun que deux personnes habitant Clermont-Ferrand. Tu aimes parfois te dire : j’appartiens à la ville où vit Sandrine, et j’aime Sandrine comme ma ville, sans la comprendre ni la penser.
Internet t’informe que la Zone Belle-Fenestre est un parc paysagé arboré, de 17 hectares, un écrin parfait pour composer votre événement. Parmi les huit demeures de caractère reconstruites sur les ruines d’anciens châteaux, quatre sont privatisables et idéales pour organiser mariages, anniversaires, cocktails, garden parties…

Tu n’as aucune idée de la taille d’un hectare. Le mot t’inquiète, comme tous les mots commençant par un h muet. Un hectare doit être immense pour ne pas pouvoir se compter en mètres ou en kilomètres.
Un hectare, un hectolitre. Dix-sept hectares, dix-sept hectolitres. Le corps d’un adulte contient zéro virgule zéro cinq hectolitres de sang, ce qui paraît ridicule. Tu ne sais pas pourquoi tu as retenu ça.
Te vient pourtant cette inquiétude, l’image du sang, alors que le GPS cherche encore. Tu imagines tout de suite le pire, en détail :
Tu te vois arriver à l’hectare 1, la nuit est épaisse, le parc sombre, les lampadaires cassés et les huit demeures de caractère se ressemblent comme des cailloux.
Ton téléphone n’a plus de batterie.
À un embranchement tu dois choisir une direction : droite, gauche, milieu ?
Tu prends le chemin du centre. Il te mène à une impasse lugubre. Tu erres.
À l’hectare 2, un homme surgi de nulle part empoigne tes cheveux.
Tu rampes, blessée, jusqu’à l’hectare 3, ne te relèves pas. Tu rends ton dernier souffle dans un endroit stupide, près d’une mare aux nénuphars décorative, tandis que pas loin, dans un endroit que tu n’auras jamais trouvé, Sandrine embrasse son futur époux au milieu d’invités dotés d’un meilleur sens de l’orientation que toi.

Si Antoine avait accepté de t’accompagner, il aurait pu te guider. Tu aurais marché dans la Zone Belle-Fenestre les yeux fermés, ta main dans la sienne. Il n’aurait pas laissé l’extérieur t’étouffer. Il t’avait juste dit : « Je te rejoindrai plus tard ». À sa manière de baisser le regard et de tourner étrangement les yeux dans leur orbite, tu avais compris que ce n’était pas sûr. Il te rejoindrait si sa fête à lui ne lui plaisait pas, s’il lui restait encore de l’énergie, ou si tu le suppliais de t’escorter.

Tu appelles Sandrine, et lui dis que tu ne viendras pas. Que tu avais oublié qu’on était vendredi. Que pour toi, depuis le chômage, la semaine et le week-end ne sont qu’un flux, que tu as un ganglion et puis que ta robe est tachée.
Elle te laisse parler.
La dernière fois que Sandrine est venue chez toi, elle a ouvert la fenêtre et a dit : « Ça sent le renfermé ici. » Elle avait raison. Cette odeur est la tienne ; tu n’es pas vraiment différente de ton odeur.
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C'est sans fin. Le moindre dérèglement du paysage peut t'amener aux récits les plus fous.
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