On m'a souvent demandé à quoi ressemblait un dîner de sorcières. Est-ce qu'elles se nourrissent de chair humaine? Est-ce qu'elles arrivent à califourchon sur des balais? Ce ne sont là que des préjugés de la part de ceux qui ne savent pas.
Les odeurs somptueux du dîner qui se préparait me rendaient folle, car nous avions commencé à jeûner en prévision de la communion de la messe minuit. Il faut savoir, en effet, qu'en ces temps de corruption, où les libertins ne se confessaient qu'au seuil de la mort, et les soldats et les libres penseurs presque jamais, les sorcières de Paris ne manquaient jamais la messe. Seuls le roi et sa cour les égalaient dans leur stricte observance. Celles-ci comme ceux-là ne connaissaient pourtant rien aux Saintes Ecritures et croyaient plus au diable qu'en Dieu. Mais dans la mesure où sans Dieu il n'y a pas de diable, les sorcières rendaient hommage à celui qui était en haut pour mieux adorer celui qui était en bas.
Pourquoi les gens persistent-ils à pactiser avec le diable? si Dieu n'existe pas, alors le diable n'existe pas non plus, et tout n'est que perte de temps et sottises. Mais si Dieu existe, pourquoi un être sensé voudrait-il avoir affaire à un être de second ordre tel que le diable? Cela va non seulement à l'encontre de la logique, mais c'est de mauvais goût.
Une belle silhouette ou un joli profil, chez un homme ou une femme, étaient un avantage, mais un petit avantage ; la rumeur d'un héritage ou la réputation d'avoir de la chance au jeu étaient préférables. Mais rien ne valait un quelconque lien avec le roi, aussi ténu soit-il. Dans cette perpétuelle lutte pour être vu, pour être le sujet de commérages pendant au moins cinq minutes, il n'y avait pas meilleur atout que d'être une femme de cent cinquante ans qui savait lire l'avenir dans l'eau et pouvait accepter de se séparer d'un pot de sa crème de jouvence.
- Cette comédienne vous attend-elle ? Ou la louez-vous seulement comme vous louez une voiture ?
- Geneviève Pasquier, dit-il, ne vous êtes-vous jamais dit que l'amour pouvait ne pas s'acheter ?
- Bien sûr, monsieur d'Urbec. L'amour a maintes motivations. La vengeance, par exemple.
- Et la cruauté, Mademoiselle. Cette innocente cruauté qui pousse les chats à déchiqueter une souris ou les enfants à arracher les pattes d'un insecte avec lequel ils jouent. Le besoin qu'un monstre intelligent a de savoir comment les choses fonctionnent.
Si les murs de ce pavillon pouvaient parler, ce sont des milliers de secrets qu’ils révéleraient.
Chapitre 32
Je quittai la maison de la sorcière encore sous le coup des découvertes que je venais d’y faire. La Voisin n’était pas une débutante, elle n’était pas une simple ménagère qui garde de la mort-aux-rats dans son placard. C’était une empoisonneuse professionnelle, peut-être la plus grande d’Europe.
Chapitre 30
C’était une espèce de transformation magique qui durait jusqu’au jour où le Roi-Soleil posait ses yeux ailleurs, et alors la magie s’évanouissait.
Chapitre 18
Tout ce que fait notre monarque est la perfection même, y compris s’asseoir sur sa chaise percée lors de la cérémonie du petit coucher.
Chapitre 16
— Le diable…, reprit-il, songeur, quand l’avez-vous rencontré ? Pouvez-vous me le faire connaître ? Avez-vous été obligée de lui donner votre âme en échange de ce don surnaturel ?
Je commençais à être agacée par ses balivernes.
— Pas que je sache, répondis-je d’un ton léger en essayant de prendre de la distance par rapport à ses paroles. Je ne suis que le malheureux produit de l’alchimie. Une femme de bonne famille semblable aux autres… trahie par l’amour… une expérience qui a mal tourné.
Chapitre 15