Si je me suis lancée sans grande conviction dans la lecture de ce roman, j'ai néanmoins été très vite happée par l'histoire. Au début du roman, c'est Aurora qui prend la parole en se présentant comme une vieille femme arrivée au bout de sa vie et qui décide de prendre la plume pour raconter l'histoire de sa famille. J'admets que les incursions d'Aurora dans la narration m'ont toujours un peu surprise, voire dérangée. Si au début du roman je pouvais comprendre son intervention (ça présente un peu le roman comme des mémoires, lui confère une impression de « vrai » que j'aime tant retrouver dans les romans), ses interventions par la suite m'ont ennuyée, j'avais l'impression qu'elle venait interrompre la trame narrative. J'ai d'ailleurs lu ces parties en diagonale car selon moi, elles n'apportaient rien au roman (sauf peut-être à la fin pour expliquer sa démarche). Néanmoins, la suite du roman m'a rapidement convaincue. L'histoire commence au début des années 2000 en Irlande et relate la première rencontre de Grania et d'Aurora. J'ai aimé comment l'auteur entourait cette rencontre de mystère (notamment par la description des paysages : ça donne envie de visiter l'Irlande) car je me suis souvent retrouvée à hésiter : Aurora était-elle bien réelle ? Ne s'agissait-il pas d'un fantôme ? Ce sont ces hésitations qui m'ont donné envie de lire la suite du roman, j'avais envie d'en apprendre plus sur cette petite fille qui semblait si étrange et du rôle qu'elle allait jouer dans la vie de Grania. J'ai donc dévoré une centaine de pages sans m'en rendre compte, juste pour savoir où la rencontre de Grania et d'Aurora allait mener. Cette rencontre m'a également permis de voir Grania sous un autre angle, plus humain, alors que jusque-là je l'avais mise dans la catégorie "femme têtue, fière, qui a tout, mais ne s'en contente pas", ce qui la rendait extrêmement antipathique à mes yeux.
Ensuite, on a fait un bond dans le temps (à environ 20% du roman) : grâce aux lettres que Grania retrouve, on découvre l'histoire de sa grand-mère Mary à partir de 1914. J'ignorais que ce procédé était aussi fréquent, mais dans les derniers romans que j'ai lus, je vois beaucoup de sauts dans le temps, de destins qui s'entremêlent d'une génération à une autre, je pensais d'ailleurs que je n'allais pas trop aimer ces sauts dans le temps, mais en réalité, j'ai beaucoup aimé cette incursion dans la vie d'une jeune Irlandaise en plein chaos européen. C'est d'ailleurs la partie du roman que j'ai préférée et j'ai regretté qu'au final, elle ne représente que 20% du roman. J'ai adoré la description de la vie de Mary et sa force de caractère, son courage en ont fait l'un des personnages les plus attachants du roman. Elle n'a pas été épargnée par le destin, mais elle a fait preuve d'une grande force, même si elle avait du mal à comprendre les changements de mentalité de l'après-guerre. Sa relation avec Anna, la petite orpheline dont elle était la gouvernante, m'a tout particulièrement touchée : il ne faut pas nécessairement être unis par le sang pour former une famille (en cela, Grania se rapprochera fortement de sa grand-mère).
Après une telle incursion dans le passé, qui m'a laissé un très bon souvenir de lecture, revenir dans le présent a été quelque peu difficile pour moi, au point que j'ai eu beaucoup de mal à m'intéresser à la seconde partie du roman.
Au fil des pages, on découvre les liens qui unissent la famille de Grania à celle de d'Aurora, et selon moi, il aurait mieux fallu que ça s'arrête à la moitié du roman, après les révélations sur l'histoire de Mary car ensuite, ça part un peu dans tous les sens. On va passer par tous les drames possibles et imaginables, histoire d'accentuer encore plus la dichotomie entre les deux familles en présence et le malheur qui entoure chacun de leurs contacts. On refait un saut dans le temps, en atterrissant dans les années 70, à l'époque de l'adolescence de Kathleen la mère de Grania, on rajoute quelques drames, une famille qui se déchire. Puis, on repart au début du 21e siècle, on rajoute un drame dans l'histoire d'Aurora. Enfin, les choses semblent s'arranger, on leur laisse quelques années de bonheur et puis on se retrouve dans les années 2010 et c'est reparti pour un drame qui cette fois-ci est présenté comme un retour à la normale, à la paix. Oui, mais non. J'ai trouvé la fin tellement injuste ! le roman, dans sa forme (« il était une fois », Aurora qui porte le nom de la princesse dans La Belle au bois dormant) rappelle les contes de fée, on s'attend donc à ce que ça se termine par un « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants », mais l'auteure a décidé de nous en faire voir de toutes les couleurs jusqu'au bout, détruisant nos dernières espérances… Ça m'a semblé à la limite du sadisme, comment a-t-elle pu torturer ces personnages à ce point ? En entrainant ses lecteurs avec elle ? Oui, j'ai été déçue par la fin, j'aurais aimé que les choses se terminent bien et je n'arrive pas à voir l'espoir, la paix que l'auteur cherche à mettre en avant avec une telle fin.
Cela ne veut pas dire que je regrette d'avoir lu ce roman. J'ai apprécié l'écriture de
Lucinda Riley : elle est très fluide, entrainante, captivante. On tourne les pages les unes après les autres sans trop de difficultés. On est subjugués par les beaux paysages irlandais, par les bâtiments somptueux qui sont décrits, on est hypnotisés par le personnage d'Aurora qui a quelque chose d'obsédant (elle est tellement vivante tout en étant décrite comme un personnage presque fantomatique au début du roman). le personnage d'Aurora m'a beaucoup fait sourire, elle semblait tellement adulte, ce qui contrastait avec sa description physique. J'ai aussi aimé l'incursion dans l'Histoire, les liens entre l'Angleterre et la Russie au moment de la révolution russe, la danse classique (qui est un thème récurrent dans le roman et qui unit les générations, tout en jouant également le rôle de barrière entre les deux familles). J'ai néanmoins quelques déceptions. Notamment la fin (bon ça, vous l'aurez compris), mais aussi l'impression que quelque chose manque, par exemple dans la vie de Mary (pour l'histoire avec son fiancé irlandais, la famille de son époux qui coupe les ponts, la fin de sa vie) et dans l'histoire de la mère biologique d'Anna (les détails qu'on découvre auraient dû être étoffés selon moi, surtout ses liens avec l'aristocratie russe, son destin, ses liens avec l'Angleterre). Je n'ai pas non plus été convaincue par le personnage de Grania qui m'a semblé très antipathique, en particulier dans sa relation avec Matt – je me serais volontiers passée de leur histoire.
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