En lisant les critiques des Babelnautes, il apparaît que ces lettres peuvent être perçues comme des conseils du style "croissance personnelle" new-age. Et c'est très bien, car il y a de multiples façons de percevoir ces textes. Je dirais que l'on y découvre des choses différentes à chaque relecture, un peu comme dans une Suite de Bach. Et c'est aussi le piège tendu par
Franz Xaver Kappus, leur destinaire, quand il décide de les publier. Dans la postface de mon édition (Seuil, L'école des lettres)
Christophe Donner écrit:
"il n'y a pas de leçon à prendre dans la beauté de ce qu'il [R.M.
Rilke] écrit, tout cela n'est utile à personne, il y a un état de lecture qui doit nous suffire."
Ainsi, je ne saurais trop conseiller au lecteur de les lire plus lentement, car leur subtantifique moëlle se trouve au-delà des mots, des formules de politesse et de cette rhétorique pédagogique. (Je lis dans les commentaires des reproches quant au style ampoulé de
Rilke; bien entendu, celà est dû à la nature de la langue allemande dont la traduction peut donner un aspect un peu lourd aux formulations.)
Il se dégage donc de ces lettres une
poésie dans la forme elle-même, à l'instar d'oeuvres comme
Citadelle, d'Antoine de
Saint-Exupéry. La beauté intrinsèque de cette
poésie incite à méditer.
Ces
Lettres à un jeune poète visent à susciter une forme de bonheur qui adviendrait par une attitude littéralement stoïcienne. En tous cas, c'est ainsi que je les comprend. C'est une relecture pour moi, sans doute à effectuer plusieurs fois dans une vie, comme un rappel de vaccin.