La nuit répand ses voiles
sur des lueurs qui ne meurent pas,
la nuit joueuse, la nuit gourmande,
la nuit qui aime la lumière, comme
j'aime ces lieux où mon enfance
reflétait la couleur des saisons.
Les vanneaux tissent, dans le ciel,
d'enfantines légendes ,
ils ne laissent pas de traces,
et pourtant, on voit, dans la profondeur
qui demeure après leur passage,
une légèreté de paupières fermées
sur un songe d'amour qui ne s'éteindra pas
Il y a dans l'ivresse de la lumière
que les mésanges matinales rendent
plus forte encore, il y a des portes
ouvertes sur la vie, avec tant
de frémissements qui ressemblent
aux étoiles, à la sève nerveuse,
qu'on se sent aussi grand que le jour
qui lèche les fenêtres et régénère
le présent plein de couleurs
et d'indicibles espérances.
On est pris d'une langueur
dont on aime le bercement,
ce bercement dont se grise l'automne,
entre de massives ombres
et d'instables lumières.(...)
Le jour, octobre l'écrase,
comme un lourd abandon
sur un fragile amour.
Que m'emporte le printemps!
qu'il m' entraîne ! Je ne veux être
que son souffle et la légèreté
de ce qu'il dissimule
sous ses offrandes et ses promesses.
C'est un ruisseau qui chante,
dans les bras bleus du crépuscule.
Ah! l'amour comme une main
qui éclôt sur la mienne,
comme le choc ardent d'une étreinte absolue
et comme ce martèlement du sang
qui libère des feux
jusqu'au fond des ténèbres.
La beauté des étoiles dépend de l'oeil
qui les regarde, comme l'amour
dépend des caresses données.
Un parfum de lilas remplace
qui nous sommes, et c'est très bien ainsi,
puisque le merle noir qui enfonce
son chant dans les sursauts du temps,
suffit au monde et le prolonge
sans que nous y soyons vraiment
pour quelque chose. Le parfum des lilas,
même s'il semble plus fragile
que nous, c'est lui que le vent
descendu des montagnes
retiendra dans ses profondeurs.
Les visages anciens ne s'effacent jamais
le temps nous émiette, c'est certain,
mais dans nos souvenirs, demeurent
les sourires qui nous consolèrent
et les regards qui nous reconnurent.