Une étude magistrale, captivante et fort bien documentée tout en restant accessible à tous. de surcroit, contrairement à trop d'autres, l'auteur évite l'écueil de l'irlandocentrisme réducteur et borné, et bien que signant là un ouvrage de référence, ne verse pas non plus dans l' austérité d'un essai universitaire tout aussi aride que rébarbatif, ce qui est tout à son honneur. Bref, vivement recommandé.
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L'étymologie du mot "Halloween" n'est pas certaine. Son origine ancienne ne nous est pas connue. Tout au plus semble-t-on y reconnaître la racine germanique "hel", qui a donné "hell" ("enfer") en anglais. Pour les explications plus modernes, il s'agirait de la contraction de "Hallowed Even", "soir sacré" ou "nuit sacrée", ce qui fait référence à Samhain. Avec la domination du christianisme, il est devenu interdit de pratiquer les anciennes fêtes (même si elles se pratiquaient toujours en secret dans les campagnes), ou même d'en prononcer le nom. Il est probable que Samhain devint ainsi le "soir sacré". Quand l'Église institua la fête de la Toussaint ("All Hallow's Day", en anglais), justement pour contrecarrer les célébrations de Samhain toujours vivaces, on forgea "All Hallow's Eve", "veille de la Toussaint", que l'on contracta en "Halloween", de façon à célébrer Samhain sous un vernis plus ou moins chrétien. On ne sait trop quelle étymologie est la bonne.
Les grandes fêtes païennes n'étaient pas placées au hasard dans l'année, elles étaient toutes liées les unes aux autres dans le cycle des saisons. Toutes étaient séparées par des périodes de quarante jours (reprises par les chrétiens), temps qui correspond à la durée nécessaire à l'épanouissement de l'esprit et de la matière. Cela correspond à une période de transformations annonçant la fin du cycle naturel et le début d'un autre. Ainsi, le calendrier celtique (et n'oublions pas que les grandes fêtes traditionnelles proviennent d'un fond de culture celtique, récupéré par les chrétiens) plaçait ses quatre grandes fêtes de l'année décalée chacune de quarante jours par rapport aux équinoxes et solstices (avec le léger décalage d'une année à l'autre dû à la précession des équinoxes), ce qui correspond aux passages cycliques de la course solaire simultanément de l'ombre à la lumière, tout comme l'esprit humain entraîné dans son évolution. Chacune de ces fêtes (Samhain, 1er novembre; Imbolc, 1er février; Cetsamhain-Beltaine, 1er mai; Lugnasad, 1er août) marque une étape de l'initiation de l'être retrouvant en lui les cycles naturels. Les fêtes païennes avaient donc un sens précis, alors que nos fêtes modernes ne sont que des prétextes à s'amuser, sans significations réelles et sans valeur spirituelle.
Halloween-Samhain marque la fin de l'été et le début de l'hiver. Samhain marquait l'entrée de ce qu'on appelle toujours, en Bretagne, les "mois noirs" (miz du, "mois noir", c'est-à-dire novembre, et miz kerzu, "mois très noir", décembre), période de repli sur soi, où l'on vit en "vase clos", mais aussi période idéale pour renouer le fil qui relie aux ancêtres (d'où l'importance des défunts et des esprits en cette période). Elle ouvre le cycle hivernal, lequel est refermé par la fête de Cetsamhain-Beltaine du 1er mai, précédée par la nuit de Walpurgis. Halloween n'est pas une fête isolée, elle s'inscrit et ne peut se comprendre que dans le contexte de ce cycle hivernal.
Chez les Germano-Scandinaves, on fêtait à ce moment la 3e moisson et les morts, et l'on célébrait la déesse Hel, fille du dieu malin Loki et de la géante Angerboda ("Fauteuse de Mal"). Hel avait pour frères le loup Fenrir et le dragon Jörmungandr, le "Serpent de Midgard". Elle est la déesse de la mort (plus spécifiquement des morts non tombés au combat), et règne sur Helheim, domaine des défunts, que l'on a improprement assimilé à l'Enfer (on en retrouve la racine dans l'anglais hell, "enfer"). On voit donc dès à présent que l'aspect "macabre" de l'Halloween moderne est tout à fait légitime.