Il y a toujours, en démocratie, une tension structurelle entre volonté et décision, long terme et court terme, et le citoyen est lui-même partagé entre son impatience et son attente de stabilité ou de changement durable. En démocratie, les citoyens sont écartelés entre le désir de pouvoir reprendre à tout moment le contrôle d'un pouvoir élu et la demande que soient mises en œuvre de "véritables" politiques. L'écart de plus en plus fréquent entre les résultats d'un vote ayant amené des gouvernants au pouvoir et les variations consécutives de la confiance qui leur est accordée ne fait qu'exacerber cette tension. D'où la centralité de la discussion sur la durée des mandats et, parallèlement, les multiples propositions pour "rafraîchir" plus fréquemment l'expression électorale. C'est à quoi revient la réclamation de voir tenus des référendums ou la revendication de mise en place de procédures de révocation. Le référendum est donc considéré là comme un substitut à une fonction plus générale de contrôle et comme un moyen de purger la défiance. Modalité qui a l'inconvénient majeur de gommer la distinction entre décider et vouloir en démocratie.
Au regard de ces théories auxquelles adhèrent volontiers les mouvements populistes, les citoyens doivent donc prendre conscience de ces gigantesques manipulations ourdies par des élites masquées et cesser d'être dupes de la façade démocratique que présente la politique moderne. On peut parler en ce sens d'une fonction cognitive et politique des théories du complot ; fonction de retournement d'un sentiment diffus de dépossession et d'imputation de l'origine des malheurs de l'humanité. Celle-ci se double en outre d'une fonction psychologique : elles permettent de trouver des réponses simples aux problèmes que chacun rencontre. Tocqueville notait déjà en ce sens qu' "une idée fausse, mais claire et précise, aura toujours plus de puissance dans le monde qu'une idée vraie et complexe".