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Critique de Erveine


Joseph Roth est un être charmant, passionnant à tout point de vue et son oeuvre est remarquable. Juste avant de lire ce livre, j'étais attablée avec lui, dans quelque café pour boire un Pernod en bonne et due forme selon « La légende du Saint buveur » et ce fut savoureux et fantastique.
Ici, dans la Crypte des capucins, j'ai noté cette noble envolée situant l'immensité d'un empire et la capacité de vivre ensemble de toutes ces âmes en tous ces horizons.
« ― Rien n'est bizarre dans cette monarchie, répliqua le comte Chojnicki, notre doyen. Sans nos imbéciles de gouvernants (il aimait les expressions fortes), il n'y aurait là rien de bizarre, pas même en apparence. Je veux dire que cette prétendue bizarrerie est tout ce qu'il y a de plus naturel en Autriche-Hongrie. Je veux dire en même temps que les choses naturelles ne paraissent étranges qu'à cause de l'état de notre Europe détraquée par les États nationaux et les nationalismes. Évidemment, ce sont les Slovènes, les Galiciens et les Ruthènes de Pologne, les Juifs à caftan de Boryslaw, les maquignons de la Bacska, les musulmans de Sarajevo, les marchands de marrons de Mostar qui chantent l'hymne de l'empereur. Mais les étudiants de Brno et d'Eger, les dentistes, pharmaciens, garçons-coiffeurs, artistes photographes de Linz, Graz, Knittelfeld, les goitreux de nos vallées alpines, eux, chantent tous la Wacht am Rhein. Messieurs, l'Autriche crèvera de cette fidélité de Nibelungen teutons. La quintessence de l'Autriche, on ne la découvre pas au centre de l'empire mais à la périphérie. Ce n'est pas dans les Alpes qu'on trouve l'Autriche : on n'y trouve que des chamois, des edelweiss, des gentianes, mais on n'y devine qu'à peine la présence de l'aigle bicéphale. La substance autrichienne est sans cesse nourrie, refaite par les pays de la Couronne. »
Le narrateur François-Ferdinand, à cause du désordre du monde, s'enrôle pour la guerre au côté de son ami et cousin Joseph Branco le Slovène et du cocher juif Manès Reisiger originaire lui de Galicie. C'est au travers de ces trois personnages que je découvre après une première immersion dans la Marche de Radetzky le devenir et la chute de l'Empire Austro-Hongrois.
Ainsi, le dernier Trotta de Vienne va demander au vieux François-Joseph, qui fut paternel à ses jeunes années, quelques raisons d'espérer.
Il se dirige vers la Crypte des capucins, là où repose la dynastie des Habsbourg en corrélation avec la basilique Saint-Denis pour les rois de France.
« Mais la Crypte est fermée. le capucin qu'il rencontre à la porte impose silence au trop fidèle sujet dont le loyalisme peut passer pour séditieux, dans une ville où, cette nuit, l'étendard à croix gammée flotte partout : « Où aller maintenant ? Où aller ! Moi, un Trotta ? Roth le savait. C'est réfugié définitivement à Paris, dans la patrie des droits de l'individu et de la tolérance que, jusqu'à la veille de sa mort, il a travaillé de toutes ses forces au-delà de ses forces, à secourir ceux de chez lui et à tenter d'unir les Autrichiens de toutes les opinions en vue de la libération de l'Autriche, dont « l'empereur », pour lui, n'était que le symbole. »
Joseph Roth, grand homme, grand auteur.
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