Citations sur La Guerre sans nom : Les appelés d'Algérie (1954-1962) (3)
《 J'étais un peu... hébété. J'ai mis un an à me remettre dans la vie active vraiment. Je me souviens, les premiers temps, dans les rues... Au moindre bruit de moto, je sursautais. La nuit, je me réveillais et je me disais : c'est fini, tu es rentré. La guerre n'avait changé ; tous ceux qui sont passés par là sont revenus avec un caractère changé, durci. Je crois qu'on a... vieilli. 》
(page107)
Comme lui, ceux d'Algérie ont l'impression d'être une génération d'oubliés, d'exclus de l'Histoire. Les livres relatent les exploits des poilus de 14-18, évoquent les résistants sous l'occupation allemande. Les anciens combattants d'Algérie se morfondent dans un pesant oubli qu'ils ont eux-mêmes longtemps entretenu. L'amnésie a été longue : pendant trente ans la guerre d'Algérie est restée enfouie dans les mémoires de ceux qui l’ont vécue.
(page 12)
《 On n'oublie pas. On n’oublie pas une expérience, c'est dur d'employer le mot expérience, parce que c'était bien plus fort que cela. On oublie pas deux ans de vie intensive à vingt ans. Ce n'est pas possible. Je n'ai appris qu'une chose à l'armée, j'ai appris à connaître les hommes... J'ai appris à connaître l'être humain vraiment... vraiment à fond. Lorsque les gens se battent, lorsque les gens ont peur, vous les voyez vraiment. Vous voyez l'homme qui a peur... qui est au bord des larmes. Voir celui qui pleure de frousse c'est une expérience humaine assez extraordinaire. Les gens sont nus devant vous. Ils ne peuvent pas vous raconter d'histoires 》.
(page 100-101)