Vers la fin de l’année 1768, l’astronome de l’Académie des sciences de Berlin, Jean Bernoulli, se rendit à Londres par la Belgique. Arrivé dans la métropole anglaise, il écrivait le 8 décembre à un ami : « Le Brabant et la Flandre, que j’ai traversés pour la seconde fois en quittant Dusseldorf, ne m’ont rien offert de remarquable; il est vrai que je ne me suis arrêté qu'à Bruxelles, où nous avons resté sept à huit jours. Je n’ai pas besoin de vous dire que cette ville dispute le pas pour la beauté de plusieurs établissements, à quelques-unes des principales villes de l’Europe; mais on peut d’autant plus s’étonner que personne n’y sente les attraits de l’astronomie. Le prince Charles (de Lorraine) protège les sciences, il accueille les nouvelles inventions, il augmente tous les jours son riche cabinet d’histoire naturelle ; peut-être voudra-t-il un jour encourager aussi l’astronomie et chercher à la faire fleurir dans les Pays-Bas autrichiens,
comme en Autriche même. »
Bernoulli ne pouvait manquer de s’intéresser à la Belgique : sa famille était originaire d’Anvers, et, comme tant d’autres, avait quitté notre pays pour se soustraire aux persécutions du duc d’Albe. Le jeune astronome de Berlin n’ignorait pas que sa science favorite avait été jadis en grand honneur parmi nous, et il devait s’affliger de la voir ainsi négligée. On aurait pu croire que l’établissement de la Société littéraire, en 1769, et l’érection de l’Académie impériale et royale des sciences et belles-lettres, en 1772, raviveraient le goût de l’astronomie chez les Belges : il n’en fut rien. Les observations qui furent faites, les travaux qui parurent dans les Mémoires de l’Académie, vinrent de savants étrangers dont l’éducation avait été achevée dans des pays mieux favorisés que le nôtre. Puisqu’ils nous apportèrent le tribut de leurs connaissances, il est juste que leur souvenir soit conservé.
Emmanuelle Javaux est biologiste (ULiège, Belgique) et docteure en géologie (U. Dalhousie, Canada). Elle a réalisé un postdoctorat (Harvard, USA) pour mener des recherches sur l'évolution des premiers eucaryotes puis un second (département d'Astrophysique, ULiège) pour développer l'astrobiologie en Belgique. Elle est Professeure Ordinaire et directrice de l'équipe Early Life Traces & Evolution-Astrobiology et de l'Unité de Recherche Astrobiology à l'ULiège. Depuis 2014, elle est membre de l'Académie Royale de Belgique. Ses recherches portent sur l'évolution de la biosphère pendant le précambrien, depuis les premières traces de vie jusqu'à la diversification de la vie complexe (eucaryote), et sur la caractérisation et la fossilisation de biosignatures utiles à la paléobiologie et à la recherche de vie extraterrestre dans le système solaire et au-delà. En combinant des approches multidisciplinaires et multi-échelle, elle et son équipe explorent le registre microbien fossile dans des roches datant de 3.5 à 0.5 milliards d'années, dans diverses régions du monde comme l'Australie, l'Afrique, le Canada, la Chine, …mais étudient aussi des microorganismes modernes comme des cyanobactéries et des protistes. Elle a contribué à la découverte des plus anciens microfossiles avérés et des premiers eucaryotes. En 2012, elle obtient une ERC Starting Grant pour le projet ELITE portant sur les premières traces et l'évolution de la vie, et les implications pour l'astrobiologie. Elle est aussi impliquée dans la mission exobiologique Exomars de l'ESA, coordonne le projet international BELSPO PORTAL qui vise à explorer l'habitabilité et la possibilité de photosynthèse sur des exoplanètes, et est membre du comité de gestion de l'European Astrobiology Institute.
Cette vidéo fait partie d'une série de vidéos sur le thème de l'astrobiologie : https://astrobioeducation.org/fr/
+ Lire la suite