Les journées défilent et se ressemblent, j’en avais perdu l’habitude depuis cinq ans. Quand on passe son temps à traverser les États pour aller d’un boulot à un autre, on apprend à s’adapter rapidement, et surtout, on ne s’ennuie jamais. J’avais même réussi à aimer ce rythme de vie.
La colère, la tristesse ou bien la haine ne sont pas des sentiments qui font bon ménage quand on travaille avec les chevaux.
Tout le monde connaît la vie de tout le monde dans cette petite communauté. Quand on se rend au centre-ville, où se trouvent le magasin général – celui qui propose aussi bien des vêtements féminins que des accessoires pour chevaux –, mais également l’unique petit café-restaurant de l’agglomération, on peut apprendre les moindres faits et gestes de telle ou telle personne… il suffit de poser la bonne question.
La faible lueur m’empêche de bien distinguer les traits de son visage, cependant je les connais déjà sur le bout des doigts, ils sont gravés dans la mémoire de ma peau. Je pose délicatement ma main sur sa joue recouverte d’une barbe de quelques jours. Descendant la courbe de sa mâchoire, je tourne sa tête vers moi et pose mes lèvres sur les siennes.