Le sort du montagnard est de gagner son pain quotidien, la cognée ou la houlette à la main. Ceux qui manient la cognée abattent les sapins de la forêt et les dirigent vers les eaux de la Bistriţa ; après quoi, ils en font des radeaux qu’ils mènent jusqu’à Galaţi, au bout du monde ! Les plus travailleurs acquièrent des bergeries à la montagne. Ils y séjournent, avec Dieu et la solitude, jusqu’au moment où les journées raccourcissent.
Ces montagnards qui vivent sous les sapins, ce sont d'étonnantes créatures. Vifs et inconstants comme leurs torrents, comme leur climat ; endurants à la souffrance autant qu'aux rigueurs de l'hiver ; insouciants dans leurs joies comme dans le four de l'été, ils aiment l'amour, la boisson et leurs coutumes aussi vieilles que le monde ; ils se méfient des étrangers et des gens de la plaine, se réfugiant en leur foyer comme le fauve dans son antre ; et par-dessus tout, ils ont un cœur à l'image du soleil : le plus souvent radieux, débordant de chants, d'amitié.