« — Pourquoi je suis noir et toi blanche ?
Il avait quatre ans et je ne m'étais pas préparée à cette question. »
Nous sommes en Colombie dans la province de Choco, un des états qui fut le plus sujet à la violence des FARCS.
Elle , la narratrice, descend le fleuve Atrato en pirogue, avec son enfant « prêté »et son pingouin en tissue 😊pour rejoindre Bellavista, un bled où vit la mère biologique. Un voyage long qui nous fait sourire mais nous tire aussi une larme . A travers les descriptions des événements et l'histoire des voyageurs , scintille
L Histoire colombienne au passé et au présent,
-Ça vous plaît d'être blanche ? lui lâche la voisine.
À un arrêt où ils s'arrêtent pour leurs besoins sort d'une cabane (magasin d'alimentation de l'arrêt) une fillette grassouillette, le corps passé dans une bouée. La conductrice de la pirogue lui demande:-— Où est-ce que tu as déniché ça ? ....Tu donnes l'impression d'être née avec.-— Je l'ai trouvée dimanche, en me baignant dans le fleuve. Je l'ai mise il y a un moment et pas moyen de la retirer, même avec du savon.😊.
Un style naïf et simple comme les peintures indigenes de cette partie du monde, même style que celui de
Pilar Quintana , une autre Colombienne, l'auteure de
la Chienne. L'Enfant y est simplement touchant, émouvant avec son comportement , ses paroles , “J'entends la voix de l'enfant, il me crie qu'il a découvert les oreilles des fleurs.”Émouvant aussi ces personnes dans la misère totale qui s'entraident sans préjugés, sans arrière pensées , sans calcul. Et tout ces symboles, le Fleuve qui bénit et noie sans discrimination, les sorciers guérisseurs, la nature, les animaux….donnent un récit envoûtant où se mêlent souvenirs d'enfance de la narratrice , l'histoire de l'adoption de l'enfant et la question incessante qui lui revient, qu'est-ce être une mère ? En toile de fond, sifflent les balles des FARCS , les images des indigènes déplacés,des pénuries d'eau et d'électricité , bref de la misère et du désarroi ..... les images terribles d'un pays en grosses difficultés économiques et politiques.
Un voyage qui semble éternel, la narratrice espérant qu'il ne se termine pas, de peur de perdre l'enfant à son terme, “Je veux que quelque chose me fasse oublier là où je me rends avec l'enfant.”…..
Un premier roman émouvant, poignant et tragique d'une jeune écrivaine colombienne de trente ans qui nous vient de Medellin , que je conseille vivement à tous les amoureux et amoureuses de la Littérature Sud-américaine.
“Elle me dit que les enfants sont justes, qu'à la naissance ils ont l'histoire tatouée sur la peau et des mots purs et sincères. Puis ils grandissent et se corrompent, pourrissent.”
Un grand merci aux éditions Grasset et NetGalleyFrance pour l'envoie de ce livre poignant !
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Verslamére# NetGalleyFrance